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Commentaire sur :

Comtesse de Boigne "Mémoires" Mercure de France 2000

Les personnes qui sont nées sous l'ancien régime, qui ont vécu la révolution, l'empire, puis la restauration, sont fascinantes : leur vie enjambe la grande coupure de notre histoire, et elles sont capables de relier deux des principales composantes de notre personnalité nationale, si diverse et si complexe. La comtesse de Boigne est contemporaine de Chateaubriand, Stendhal, Balzac, Dorothée de Courlande.

Petite fille, elle a servi de poupée à la famille royale ; elle a été élevée sur les genoux de Marie-Antoinette, elle a connu l'ancienne cour. Sa vie de femme a été gâchée par un mariage malencontreux, mais elle a été la reine du Paris élégant ; Proust s'est inspiré de ses mémoires pour décrire la vie des salons, et pour certains des traits de la duchesse de Guermantes : très belle, un peu triste et froide (ou secrète, qui sait ?)

Sous cette façade élégante et mondaine, une culture très étendue et une formation intellectuelle solide : toute jeune, son père lui avait fait méthodiquement étudier ce qui se publiait de meilleur en sciences et en économie. Elle a non seulement de l'esprit, mais du fond ; dans les joutes verbales, elle est comme un champion d'escrime dont personne ne soupçonne la force, mais qui épingle l'adversaire d'un seul coup.

Elle observe, elle surveille, avec une hauteur de vue et une indépendance d'esprit surprenantes. Cette grande dame n'est pas prisonnière de sa classe. Napoléon, bon général mais grossier personnage, ne l'impressionne pas même s'il sait se faire craindre. Lors de la révolution de 1830, elle admire la calme résolution des ouvriers.

Elle consacre quelques pages à cette société française du XVIIIème siècle où l'on pardonnait tout à celui qui avait de l'esprit. A titre d'échantillon, voici la "fameuse lettre" qu'une épouse, "très spirituelle personne", envoya à son mari, et qui fait mes délices : 

"Je vous écris parce que je ne sais que faire et je finis parce que je ne sais que dire.
"Sassenage de Maugiron,
"bien fâchée de l'être."

Il faut lire aussi son admirable portrait de Mme Récamier.