Commentaires sur :
Paul E. Ceruzzi, A History of Modern
Computing, MIT 1998
Il est devenu nécessaire de voir l'informatique
avec le recul que permet l'approche historique. Cependant les historiens ne se
sont pas encore attelés à la tâche : sans doute parce qu'il faut, pour
l'aborder, maîtriser à la fois les méthodes de l'histoire et celles de
l'informatique, double compétence peu répandue ; aussi parce que le domaine
effraie par sa complexité.
Il existe des ouvrages partiels et excellents,
comme celui de Paul Carroll sur IBM. Mais pas de vue d'ensemble. C'est cette
lacune que Paul Ceruzzi a tenté de combler.
Il n'y arrive qu'en partie. D'une part, comme
souvent en histoire, il s'arrête au seuil de l'époque actuelle : s'il décrit
l'histoire de l'Internet, il ne décrit pas celle des langages orientés objet, ni
des langages de modélisation des processus, ni les "brokers" comme Corba, ni les
changements apportés par l'Intranet dans les entreprises, ni même l'intelligence
artificielle qui est pourtant une aventure déjà ancienne.
On souhaiterait par ailleurs qu'il aborde son sujet
non seulement sur les plans technique et historique, mais aussi sur le plan
philosophique. Comment exprimer autrement que dans le langage de la philosophie
des projets dont l'objet est la façon dont on construit, relie, utilise des
concepts ? Comment décrire ce qui distingue tel langage de tel autre, ce qui
fait la force ou la faiblesse d'outils bureautiques comme le tableur, la
messagerie, la documentation électronique, etc. ?
Pourtant la lecture de ce livre est nécessaire.
Il apporte des informations jusqu'ici inédites ou difficiles à trouver sur les
origines des choix techniques, du vocabulaire, ainsi que sur les mécanismes de
la réussite dans ce marché très concurrentiel. J'ai l'intention de le relire en
prenant des notes pour mieux maîtriser son contenu.
Il nous faudrait aussi un livre sur l'histoire du
logiciel ; il devrait certes faire référence au matériel (puisque les progrès du
matériel sont indispensables à l'éclosion des langages), mais aussi montrer ce
que chaque langage a de spécifique, ses apports et ses limites.
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