Qualité du service
12 juillet 2002
Voici une anecdote qui illustre la qualité de
service "à la française".
J'achète en janvier 2001 pour 5 287,54 € TTC
un vidéoprojecteur Toshiba TDP-B1. Je compte m'en servir pour faire des
projections chez mes clients et aussi pour remplacer mon écran d'ordinateur par
le mur sur lequel je projetterai : cela m'évitera de jongler entre mes paires
de lunettes et le projecteur fournit une belle image. 5 300 €, c'est près de
35 000 F. Je m'informe de la durée de vie de l'ampoule, le vendeur répond
"3000 heures".
Aujourd'hui, après 1800 heures de service,
l'ampoule a faibli et l'image est devenue illisible. J'ai repris mon écran et
mes diverses lunettes. C'est là que commence l'anecdote.
J'appelle le fournisseur (dont je préfère taire
le nom, mais je l'indiquerai à qui le demande). Il me dit : "Il faut
m'envoyer un fax pour confirmer votre commande, je vous enverrai un devis que
vous retournerez avec votre signature précédée des mots "Bon pour
accord". Ensuite il faut que vous téléphoniez à Toshiba, qui me livrera
l'ampoule, je n'en ai pas en stock. Puis il faudra que vous veniez chez nous pour que l'on vous
l'installe. Je vous conseille de faire dépoussiérer l'appareil, mais cela ne
pourra pas se faire tout de suite : il faudra que vous repassiez pour prendre le
vidéoprojecteur. Je ne peux pas vous indiquer de délai : cela dépend de
Toshiba, cela peut prendre aussi bien 48 heures que trois mois". Le devis
indique que que la lampe coûte 743,95 € TTC (près de 5 000 F), transport
compris (je suppose qu'il s'agit du transport entre Toshiba et le
fournisseur).
Un peu éberlué, j'appelle Toshiba et je demande
s'il peut me fournir directement l'ampoule. "Non, car vous n'avez pas de
compte chez nous". Que faut-il faire pour avoir un compte ? "Il faut
nous avoir commandé au moins 20 vidéoprojecteurs". Évidemment, j'en suis
loin. Je m'enquiert de la durée de vie d'une ampoule : "entre 1500 et 2000
heures". Ce ne sont pas les 3000 heures que l'on m'avait annoncées, mais
au moins mon ampoule est dans la plage normale de vieillissement. Je demande à
Toshiba de livrer l'ampoule à mon fournisseur.
Il m'a fallu 18 mois pour user l'ampoule. 5000 F en
18 mois équivalent à un loyer mensuel de 278 F. C'est un prix apparemment
insuffisant pour obtenir un service de qualité. Je calcule, au passage,
que l'utilisation du vidéoprojecteur me coûte 5000/1800 = 2,78 F par
heure.
Je suis un professionnel. J'ai acheté une
machine de 35 000 F pour laquelle il faut une pièce de rechange de 5000 F. Le
fournisseur n'en a pas en stock, alors qu'inévitablement il faut remplacer
l'ampoule de temps en temps. Il me demande de faire le travail de communication avec Toshiba,
m'indique un délai aléatoire, demande un "bon pour accord" (la peur
des invendus ! c'est comme mon boulanger : à partir de 15h00, il n'a plus de
baguettes). Après quoi il faudra que je me déplace, car l'ampoule doit être
remplacée par une spécialiste. Puis que je me déplace une deuxième fois si,
comme on le recommande, je fais dépoussiérer le vidéoprojecteur.
On trouve en France trop de magasins où il n'y a
plus de vendeurs, seulement des caissières ; le client doit faire tout le
travail pour trouver le produit, deviner quand les stocks seront
réapprovisionnés, etc. La solution au problème du chômage, c'est de
multiplier les emplois qualifiés dans les services ! et, cela va de soi, la
qualité de service aussi.
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