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Article paru dans "Le Monde Informatique" n° 817, 2 juillet 1999, p. 16

Du bon usage des théories économiques

 Les économistes commencent sérieusement à s'intéresser à l'impact des nouvelles technologies. Moins pour décrire les fluctuations conjoncturelles que pour en identifier les fondements théoriques. Michel Volle, administrateur de l'Insee, nous explique ainsi que l'industrie du micro-ordinateur et celle d'Internet sont " à coûts fixes ". " Par conséquent, le marché obéit à une logique de différenciation et de concurrence monopoliste, les exigences en matière de standardisation ne changent rien à cette situation ", écrit-il.

La baisse tendancielle des prix (les coûts fixes étant répartis entre un nombre plus grand d'utilisateurs) aboutit à déplacer la " question critique " du matériel vers le logiciel. A terme, elle se situera non plus dans le logiciel, mais " dans les usages des micro-ordinateurs en réseau ", affirme l'auteur. Celui-ci propose par ailleurs une intéressante modélisation de l'évolution d'Internet, pour en estimer les coûts futurs, en fonction d'hypothèses de croissance du trafic et de dimensionnement du réseau. Résultat: le coût moyen par utilisateur (en ce qui concerne l'investissement ainsi que le fonctionnement des infrastructures), pour l'Europe de l'Ouest, le Japon et les Etats-Unis, est de l'ordre de 300 F (45,7 euros) par an en 1998, et décroît avec le temps (200 F en 2005, soit 30,5 euros). Si l'on tient compte des charges indirectes (par exemple la promotion des services, le développement d'applicatifs ... ), l'auteur estime qu'il faut doubler ce montant. La recherche d'économies d'échelle, pour les prestataires de services et de contenus, devient donc de plus en plus cruciale.

" Les économies d'échelle, attachées à l'innovation, sont au cœur des modèles macroéconomiques de croissance ", rappelle Dominique Guellec, économiste qui s'intéresse aux effets de l'innovation. Mais le débat n'est toujours pas clos entre ceux qui estiment que la demande du marché tire l'innovation et ceux qui affirment, au contraire, que l'état de la technologie détermine les besoins. Selon cette de approche, les entreprises examinent d'abord l'évolution de la technologie et en déduisent ensuite les domaines de recherche les plus prometteurs.

Les analyses empiriques ont montré que les uns et les autres ont raison. " La demande peut être là sans que les possibilités de la technologie permettent de la satisfaire, et une technologie efficace peut ne pas intéresser le marché ", résume l'auteur. Les exemples de la reconnaissance vocale et de la télévision interactive sont là pour en témoigner. P. R.

" Économie des nouvelles technologies ", par Michel Volle, Economica, 299 pages, 195 F (29,73 euros) " Économie de l'innovation ", par Dominique Guellec, Editions La Découverte, 120 pages, 49 francs (7,47 euros).