Approche du système d'information par les
processus
Processus et pratique
Le mot " processus "
est à la mode, ce qui entraîne des confusions : lorsque quelquun
lutilise, on a du mal à savoir quel sens exact il lui donne.
Pourtant ce mot évoque non une théorie
vague et vaporeuse, mais une action pratique et dailleurs de simple
bon sens.
Toute entreprise est en effet organisée
pour la production de valeur, cette production se concrétisant par la fourniture
dun output (que celui-ci soit désigné par les termes
" produit ", " service " ou
" livrable ") en consommant certains inputs, la valeur produite
étant alors la différence entre valeur des outputs et valeur des inputs. On peut
calculer cette valeur soit en considérant lentreprise comme un tout, soit en la
subdivisant en métiers divers qui chacun produisent une valeur spécifique. On peut
encore subdiviser ce découpage, limportant étant quà chaque classe de ce
découpage on puisse associer un " output ", des
" inputs ", et une valeur. Trouver le " bon "
niveau de découpage est affaire dexpérience et de doigté, limportant étant
didentifier le découpage qui correspond bien aux possibilités de lentreprise
en matière de gestion, et qui permet une identification claire des responsabilités.
Une fois ce découpage effectué, et les
valeurs que produit lentreprise identifiées, se pose bien naturellement pour
chacune la question suivante : " Comment sy prend-on pour produire
cette valeur ? ".
Pour répondre à cette question, il faut
considérer les étapes de la production, les activités des divers acteurs (contenu,
enchaînement), les moyens quils utilisent (papier, téléphone, ordinateur, outils,
machines, biens intermédiaires), les données quils consultent, saisissent,
traitent etc.
Lorsque lon a décrit tout cela, on a
décrit un " processus ", enchaînement des activités concourant à
la production dune valeur.
On commence à parler en termes de processus
si, après avoir répondu à la question " que faut-il faire ? ", on
pose la question " comment faire ? ".
Où est la nouveauté ?
Lapproche par les processus na
rien de nouveau, et il y a longtemps que lon en fait sans le dire. Certains
pourraient alors penser quil est déplacé de donner soudain tant dimportance
à une démarche que lon pratique depuis longtemps sans le dire.
Ils ont pour partie raison - et cette
démarche colle dailleurs au bon sens, qui nest pas chose récente - mais il y
a tout de même une nouveauté : mettre laccent sur le processus en tant que tel, ce
nest pas seulement dire que lon va soccuper de " la façon
dont on fait les choses " ; cest dire aussi que lon va la
documenter, lexpliciter, lélucider. La nouveauté, ce nest pas de
parler des processus - puisquil y a des processus depuis que lêtre humain
travaille - cest de se donner pour but de les élucider.
Elucider un processus, cest :
porter sa description à un niveau
de clarté et de simplicité qui lillumine,
rendre cette description transparente
en facilitant son partage et sa communication entre les acteurs concernés.
Faire ainsi passer lorganisation des
tâches et de leur succession de limplicite à lexplicite,
cest une démarche qui a des conséquences et qui nest donc pas neutre.
Remarque : On dit souvent quil
faut " optimiser les processus ". Optimiser, cest une ambition
élevée, qui tend la volonté vers la recherche de la perfection. Se fixer un tel
objectif, cest supposer que lon est capable de déterminer loptimum a
priori. Il est préférable de suivre une démarche plus modeste, celle de
lélucidation. Elle cherche certes à atteindre un optimum, mais de façon
indirecte : en élucidant le processus, cest-à-dire en le rendant clair et
visible, donc discutable, on invite implicitement les acteurs du processus à
laméliorer, le surveiller, le faire évoluer. On crée les conditions dune
amélioration continue par les acteurs eux-mêmes, ce qui est plus réaliste - et plus
conforme à lorganisation décentralisée et transverse, corollaire naturel de
lapproche par les processus - que de sefforcer dans la phase de conception
initiale à une " optimisation " qui sera décrétée par une équipe
dorganisateurs, et difficile à faire évoluer par la suite.
Lélucidation est lun des
leviers les plus puissants de lorganisation. Il est par exemple plus efficace de
rendre la qualité visible en produisant des indicateurs, que dexhorter les gens à
bien travailler. Comme le dit Claude Riveline, " chacun se comporte de façon à
optimiser limage que donnent de lui les critères selon lesquels il se sent ou se
croit jugé ".
Améliorer les processus
Un des premiers résultats de cette
démarche, cest de rendre visibles les défauts éventuels dun processus.
Prenons quelques exemples.
- Si le traitement du courrier comporte une phase pendant
laquelle la lettre arrivée est posée sur une pile, et la pile de lettres est traitée du
haut en bas (comme cela peut arriver sur le bureau de chacun), le courrier sera traité en
mode LIFO (" last in, first out ") ce qui introduit des délais de
réponse aléatoires et des non réponses une fois le délai décent dépassé.
- Si lenchaînement des tâches ne permet pas le suivi
dune affaire (on ne peut pas savoir où est un dossier en cours de traitement, on ne
sait donc pas quelles opérations ont été faites sur ce dossier, et on ne peut pas
consulter les avis donnés avant que lensemble du circuit nait été
parcouru), on devra se livrer sur chaque dossier terminé à une vérification lourde ; on
risque de relancer des démarches en fin de course parce telle étape intermédiaire aura
été mal réalisée.
- Si lenchaînement des tâches ne
" boucle " pas (cest-à-dire si lon na pas de mesure
du délai de traitement), on risque que le dossier se " perde dans les
sables ", quil passe de main en main pour finir dans une discrète
corbeille à papier.
- Si les " livrables " intermédiaires (ce
que doit fournir chacun des acteurs qui contribue au processus) sont définis de façon
ambiguë, des allers et retours et récriminations entre acteurs successifs sont
inévitables.
- Si la saisie des données se fait sans que lon dispose
de moyens de vérification sur le poste de travail, des erreurs seront introduites dans
les fichiers ; il faudra les détecter en batch et les corriger péniblement.
- Sil faut une ressaisie manuelle pour recopier dans une
application certaines données résultant dune autre, elles provoqueront des erreurs
(taux derreur de un à deux pour mille) et introduiront des délais aléatoires dans
les mises à jour.
- Si une liste de diffusion nest pas mise à jour sans
délai en fonction des nominations et changements daffectation, les circuits des
documents et des informations seront mal ajustés.
- Si une personne nouvre jamais sa boîte aux lettres,
elle sera inopérante dans tout circuit de décision impliquant lusage de la
messagerie.
- Si une documentation technique est diffusée en mode papier,
la prise en compte des corrections apportées par les versions successives supposera un
travail de classement pénible de la part de lutilisateur, et donc souvent elle ne
sera pas faite.
- Si les données de référence sont stockées dans plusieurs
endroits différents, il faudra les mettre à jour à la main simultanément lors de tout
changement du contexte, ce qui entraîne des risques doublis suscitant des
incohérences dans le système dinformation.
De lélucidation à lanimation
Lélucidation des processus ne
comporte donc pas seulement la phase descriptive pendant laquelle on note ce qui se passe
dans de petits diagrammes (avec des cases, titres, flèches entre les cases, commentaires
etc.) ; cest aussi une phase normative, mais naturelle, car elle fait apparaître
des défauts qui sautent aux yeux, et les participants aux travaux trouvent tout simple de
les corriger.
" Faire apparaître ",
" trouver tout simple ", cela ne va pas de soi : pour que cela marche,
il faut un animateur habile qui rende les choses perceptibles en éveillant
lintuition des participants.
La collecte de linformation sur les
processus, la validation de leur élucidation, la discussion des résultats, supposent des
contacts avec des experts métier, puis une animation plus large touchant finalement
lensemble des praticiens concernés. Lexpérience montre que les gens de
métier participent avec enthousiasme à ces démarches (le mot nest pas trop
fort) : lélucidation clarifie en effet des questions qui se posaient
confusément et les mettaient mal à laise ; elle leur permet de supprimer des
dysfonctionnements irritants, ou de comprendre la rationalité sous-jacente à ce
quils prenaient pour un dysfonctionnement.
Capitaliser sur lélucidation des
processus
Résumons ce qui précède :
· Les " processus "
nont rien de nouveau : le travail dans une entreprise a toujours été organisé en
processus ;
· Ce qui est nouveau par contre,
cest laccent mis sur leur élucidation, cest-à-dire sur leur
explicitation et leur transparence.
· Cette élucidation, si elle est conduite
par un animateur expérimenté, suscite un vif intérêt des participants et entraîne des
améliorations substantielles.
Cependant il y a un risque : que
lopération soit un " coup pour rien ", que le
" soufflé retombe " une fois lanimateur passé et
lexcitation du travail calmée. La clarté acquise lors de lélucidation
sestompe dans les mémoires, les nouveaux venus nen bénéficient pas ;
après quelques mois ou années le bénéfice de lopération est perdu.
Si lon veut capitaliser le
progrès accompli lors de ce travail délucidation, il faut articuler une
transformation du système dinformation à lélucidation du processus.
Cest ce que certains consultants américains résument par la règle " pas
de processus sans workflow ", " No Process Without Workflow ".
Il y a là aujourdhui une difficulté
pratique. Les consultants spécialisés dans lélucidation des processus (on dit
" lanalyse des processus ") sont souvent des organisateurs et
non des informaticiens ; et il existe, au sein des grands cabinets, une méfiance
réciproque entre consultants en organisation et consultants en informatique. Il leur est
difficile de coopérer.
A cette difficulté pratique correspond
bien sûr un piège : dexcellents travaux peuvent être réalisés sur les
processus, sans que lon se soucie de leur articulation avec le système
dinformation. Trop souvent, ces travaux se concentreront sur des améliorations de
détail et de court terme, utiles certes mais dune utilité limitée, car ils
nenvisageront pas la totalité du processus mais seulement une partie ; par
ailleurs, il sera impossible sur la base de ces travaux de disposer des outils de
contrôle automatique permettant de vérifier leur application.
Dans le contexte culturel propre à
certaines entreprises, celui qui évoque des principes de méthode, ou même des règles
de simple bon sens, court le risque de se faire taxer d" esprit de
système ". Il serait certes trop facile de faire observer que
l" esprit de désordre " est notoirement improductif.
Quoiquil en soit, voici le travail à faire :
Elucider le rôle du SI dans le processus
Tout processus comporte deux aspects
inséparables et complémentaires comme les deux faces dune médaille :
le travail des personnes qui
participent au processus par leur jugement, leurs décisions et leurs actions ;
le système dinformation,
qui assiste ces personnes en apportant les éléments nécessaires à leur
jugement, leurs décisions et leurs actions.
Au sens large, le système
dinformation comporte tous les supports de mémoire (papier, enregistrement
magnétique), tous les modes de traitement (calcul à la main, machine à calculer,
traitement de texte, tableur) et tous les modes de communication (parole dhomme à
homme ou en réunion, téléphone, transfert de fichier etc.) Dans les organisations
daujourdhui, le système dinformation fait un usage extensif de
lordinateur. On est alors dans le monde du travail assisté par ordinateur
(TAO) : lordinateur nest pas un automate qui prend les décisions à la place
de lacteur, mais un outil qui laide dans la prise de décision en lui
fournissant sous forme lisible les informations nécessaires et en réalisant les
traitements requis.
Quand on dit TAO il faut considérer les
deux faces de la médaille : ce que fait lacteur, laide que lui apporte son
ordinateur. Le jugement, la décision et laction sont le fait de lêtre
humain, car lordinateur est inapte à ces tâches-là. Par contre la recherche et le
tri de linformation, la compulsion de gros fichiers, laffichage ergonomique,
lexécution des traitements et corrections lancés par lopérateur humain,
tout cela relève de lordinateur qui exécute ces tâches vite et sans erreur si
elles ont été correctement programmées.
Lélucidation dun processus
comporte à la fois celle des tâches remplies par les êtres humains, et
celle des opérations que réalisent les ordinateurs. Lamélioration du processus
concerne donc aussi les outils informatiques mis à disposition des êtres humains.
Mise en place dun workflow
Le processus, cest la succession des
activités des acteurs avec leurs délais, leur qualité etc. Un
" workflow ", cest une application informatique qui a pour but
de rendre visible cette succession et den permettre le contrôle. Lorsquun
processus est équipé dun workflow, il est possible de :
savoir à tout moment où en est la
procédure appliquée à un dossier, lire les avis donnés, la relancer si elle
senlise,
contrôler les délais de bouclage
sur lensemble du processus ou sur la production de livrables intermédiaires,
rerouter automatiquement un dossier
si lun des acteurs est absent ou empêché, ou sil met trop de temps à le
traiter,
produire automatiquement des
indicateurs de délais et de volume permettant à lanimateur de contrôler la
qualité du processus et de redéfinir lallocation des ressources si des goulets
détranglement apparaissent.
Le workflow, avec son formalisme et ses
outils, concrétise lélucidation du processus et permet de capitaliser cette
élucidation, cest-à-dire de la garder vivante en mémoire, de la mettre à jour et
de la communiquer.
Représentation du processus
Quand on utilise le formalisme du workflow,
un processus se décrit sous la forme dun graphe. Les nuds représentent les
tâches élémentaires (" activités "), les arcs représentent les
messages émis à la fin dune tâche pour lancer les tâches suivantes. Il est
commode de donner à ce graphe la forme circulaire qui marque que le processus est
déclenché par un fait extérieur (réception dune commande, dune
lettre de réclamation, franchissement du délai de maintenance dun équipement)
auquel le processus répond par une action sur lextérieur (livraison,
lettre, opération de maintenance). Il convient de sassurer que cette réponse a
lieu dans un délai et sous une forme convenable : cest le contrôle du bouclage
du processus, opération essentielle.
Il faut souvent introduire dautres
compteurs (volume, délai, valeur etc.). En effet, la formalisation du processus suscite
une organisation impliquant une délégation de responsabilité aux personnes qui
réalisent les tâches. Dès lors lintervention de lencadrement ne se fonde
plus sur lapprobation des actes un par un, mais sur un contrôle statistique a
posteriori et sur la diffusion de consignes nouvelles si des dysfonctionnements
apparaissent ou si lon veut faire évoluer le processus.
On peut aussi représenter le processus par
un modèle en couches :
La réalisation dun processus suppose
souvent des sous-processus fournissant chacun des " livrables "
intermédiaires (exemple : expertise fournie lors de linstruction dune demande
dautorisation dinvestissement).
Tout processus a une existence de facto,
avant la description. Mais un processus qui na pas été décrit ni pensé présente
souvent des défauts. Par exemple il ne boucle pas : la succession des tâches se
poursuit sans que lon vérifie quil a été répondu à chaque événement
extérieur, et le risque existe que le processus " se perde dans les
sables " (cest le cas lorsquune lettre de client passe de mains en
mains, sans que personne ne contrôle le délai de réponse : on finit par renoncer à lui
répondre lorsque le délai décent a été dépassé).
Situation cible
Comment se présente une entreprise dont
les processus ont été élucidés et équipés de workflows permettant le contrôle de
leur qualité (ainsi que les évolutions liées à celles des missions de
lentreprise) ?
1) Dune part, et cest ce qui
frappe le plus, les personnes qui travaillent dans cette entreprise trouvent leur travail
simple, logique, efficace. Lorganisation de la succession des tâches leur est
connue, ainsi que la démarche à suivre en cas dincident. Elles savent ce
quelles ont à faire, et ce que doivent faire les personnes avec qui elles
coopèrent. Elles disposent dun espace de responsabilité dans lequel elles peuvent
exercer leur jugement et leur esprit dinitiative.
2) Le nombre des niveaux hiérarchiques a
diminué : la transparence, lautomatisation des indicateurs rendent en effet
inutiles les " petits chefs " dont le rôle était auparavant de
transmettre aux exécutants les consignes de la direction, et de faire des rapports à la
direction sur lexécution des tâches.
3) Les structures ainsi organisées sont
" qualifiantes " : lagent accroît ses compétences en
travaillant.
4) Leur pilotage est facilité par la
transparence du processus. Cette transparence facilite aussi les démarches qualité en
faisant clairement apparaître les performances de chaque entité.
5) Les informations accumulées à
loccasion du déroulement des processus constituent une source éditoriale qui peut
être exploitée pour alimenter les systèmes dinformation décisionnels.
On fournit en annexe à ce rapport un
document sur lexpérience " Infotel "
, qui mieux que toute considération théorique illustre les conséquences pratiques de
cette démarche, ainsi dailleurs que les difficultés que lon rencontre dans
son déroulement.
Marche à suivre
Pour articuler lélucidation des
processus à la démarche qualité associée à une production de valeur, il suffit donc
de partir dune question simple : " comment est produite cette
valeur " ? Puis il faut travailler
La réponse à cette question permet
didentifier les processus de travail, de les cartographier, de repérer les
sous-processsus correspondant aux livrables intermédiaires. A chacune des classes du
découpage de lentreprise que nous avons décrit au début de ce chapitre correspond
un processus spécifique. Il nexiste pas de règle logique pour déterminer le
degré de finesse raisonnable de ce découpage, mais une règle pratique qui doit être
appliquée au cas par cas : il faut que ce découpage corresponde à une claire
identification des responsabilités, cest-à-dire que lon puisse identifier
une personne responsable pour chaque processus, personne à qui lentreprise donnera
les moyens de contrôler le processus, et qui sera jugée selon la qualité de celui-ci.
Lélucidation des processus suppose
ensuite quon les documente, selon un formalisme qui devra avoir été défini au
préalable, en consultant des experts métiers. Ce travail doit être fait avec quelques
experts seulement. La validation de cette élucidation permet ensuite de mettre à plat la
description du processus, de repérer des erreurs éventuelles, dencourager à les
corriger. La validation prend la forme dune animation avec les personnels du
terrain, et contribue à la démarche qualité.
La mise en forme ultime du processus
implique lutilisation dun workflow (" No Pro-cess Without
Workflow ! "), et suppose donc des développements informatiques confortant son
articulation avec le système dinformation.
Il faut tenir compte de cette démarche
dans la formulation des objectifs qualité des métiers.
Production de valeur et processus
Un processus est une suite
dopérations déclenchées par une action qui lui est extérieure, et aboutissant à
une réponse à cette action. Par exemple laction du monde extérieur peut être la
réception dune lettre de réclamation, et la réponse à cette action sera la
réponse à cette lettre. Ou bien laction du monde extérieur sera une commande, et
la réponse sera une livraison.
Considérons une entreprise dont la fonction de production
est
- Y = f(K, L, X),
où K est le capital utilisé (biens
déquipement), L le travail et X la consommation intermédiaire nécessaire à la
production de Y.
Typiquement, au reçu de la commande,
lentreprise doit réserver les facteurs de production nécessaires (équipement,
travail, bien intermédiaire), puis utiliser ces facteurs pour obtenir la production qui
sera ensuite livrée en réponse à la commande.
Ce schéma simple permet de voir la
relation entre processus et production de valeur. La figure représentative
dun processus est une boucle, qui commence par une action venant de
lextérieur et se termine par une action vers lextérieur. Lorsque cette
boucle se referme, de la valeur aura été produite. Ici, elle est égale à la
différence entre la valeur de la production et le coût de production :
V = pY rK wL pX,
où p, r et w sont respectivement le prix
des biens, le coût dutilisation du capital et le salaire horaire.
La figure ci-dessus montre comment le
processus sarticule à des sous-processus, qui chacun produisent une valeur
consommée ou utilisée par le processus principal.
Si la production fait lobjet
dune organisation utilisant un stock comme tampon, le mécanisme est le
suivant : en tablant sur la demande anticipée Da, elle-même établie à
partir de la série chronologique des commandes passées, on établit un programme de
production qui alimente le stock. Le stock est utilisé pour faire les livraisons. Le
niveau du stock est observé attentivement pour réviser Da et modifier le
programme de production (à la hausse si le stock baisse vite, à la baisse si le stock
monte vite).
On a alors le schéma suivant :
Le programme de production mobilise à
lavance les équipements, les personnels et les consommations intermédiaires, et le
flux de production est continu, régulé par lobservation du niveau de stocks qui
conduit à déterminer le programme de production.
Chacune des boucles du processus correspond
à une production de valeur, car elle débouche sur la fourniture dune prestation
qui concrétise la valeur ajoutée fournie pendant la boucle.
On peut représenter le schéma ci-dessus
par un modèle en couches :
Observons enfin le graphique qui
représente le processus. Les flèches rouges représentent des faits du monde réel (des
biens ou services, des " livrables " sont produits et fournis). Les
traits fins représentent la circulation dinformation. Tout processus a ainsi deux
faces : dune part il implique des faits du monde réel, dautre part il
est instruit, soutenu, contrôlé par une circulation dinformation.
Responsabilités
Le découpage des processus est déterminé
principalement par la nécessité et la possibilité didentifier le responsable (ou
" propriétaire ") de chaque processus. Un des défauts de
lorganisation implicite des processus, cest la non identification des
responsabilités, labsence de contrôles objectifs permettant de vérifier leur bon
fonctionnement (1). Lélucidation des processus suppose en premier lieu que
lon identifie leurs responsables.
La conduite dun processus suppose que
soient tenues les fonctions que nous décrivons ci-dessous. Il revient à lanalyse
des charges de travail et des compétences de décider si ces fonctions doivent être
réalisées par des personnes différentes, ou si certaines dentre elles peuvent
être réalisées par une même personne.
Il est important de prévoir dans la mise
en place du processus les outils nécessaires à la bonne exécution de ces
fonctions : la personne qui remplit une fonction doit pouvoir disposer dune
interface commode lui fournissant les informations utiles, ainsi que les moyens de
définir et lancer les actions nécessaires.
On distingue quatre types différents de
responsabilités : le propriétaire du processus, qui est le responsable
densemble et a autorité sur les autres ; ladministrateur qui gère les
droits daccès et de traitement, lanimateur qui veille au respect des règles
de bonne pratique, léditeur qui assure le traitement et la diffusion des données
fournies par les outils de contrôle.
Chacune de ces fonctions doit être doté
doutils appropriés.
Propriétaire
Il sagit du responsable fonctionnel,
chargé par lentreprise du bon fonctionnement du processus. Il est destinataire des
informations de pilotage, et doit diffuser vers les agents les messages (oraux, écrits),
la documentation, la formation et les consignes nécessaires.
Les missions du propriétaire du processus
sont, dans cet ordre, dassurer :
le service final rendu par le
processus : contrôler les conditions de délai et de qualité de son bouclage.
que le service est produit dans de bonnes
conditions defficacité : contrôler le coût de fourniture du service.
que les ressources nécessaires à la
production du service sont convenablement utilisées : contrôler et répartir la
charge de travail des personnes.
Les indicateurs quil reçoit
concernent les volumes produits, les ressources utilisées, ainsi que la qualité du
service (pertinence, délais).
Le propriétaire du processus est assisté,
dans lexercice de sa responsabilité, par ladministrateur, lanimateur et
léditeur.
Administrateur
Il gère les droits daccès aux
dossiers et aux outils de traitement. Ces droits sont différents selon que lon
considère un agent intervenant dans le processus, le propriétaire du processus, ou des
responsables hiérarchiques de divers niveaux.
Ladministrateur doit être outillé
pour que la gestion des droits obéisse sans délais aux nominations et mutations des
personnes, aux changements dans leurs missions et attributions.
Animateur
Lanimateur du processus assure la
surveillance des bonnes pratiques et du savoir-vivre dans lutilisation des outils
(exemple : la " Netiquette ").
Il surveille le respect des délais et la
qualité du processus, et intervient avec pédagogie et diplomatie pour aider les agents
dans la qualité de leur travail. Il surveille et anime lutilisation de la
messagerie, de la documentation, des forums, des agendas partagés, et de façon
générale de tous les outils communicants.
Editeur
Il assure la sélection, le traitement, la
présentation, le commentaire et la diffusion des informations fournies par le processus.
Il doit segmenter les destinataires de ces
informations, et définir pour chaque segment la forme et la périodicité de la
publication convenable. Il utilise à cette fin divers supports de diffusion (base
documentaire, messages, papier) et diverses formes de présentation (données
chronologiques ou en coupe instantanée, tableaux de nombres, graphiques, commentaires
interprétatifs de synthèse, citations en texte intégral sur des cas particuliers
illustratifs etc.).
Cest léditeur qui élabore, à
partir des données recueillies par les capteurs, des indicateurs de qualité
synthétiques dont il diffuse le suivi.
Système dinformation et Processus
(2)
Le système dinformation
sorganise désormais autour des processus de lentreprise. Il sagit
là dune innovation considérable. Toute lorganisation du système
dinformation se conçoit sur le mode du travail assisté par ordinateur :
la coopération de lacteur humain et de lordinateur devient centrale, ce qui
fait passer au premier plan lexigence de qualité des interfaces homme - machine,
ainsi que du support aux utilisateurs, alors que la conception ancienne de
linformatique avait tendance à placer cette exigence au dernier plan.
De même, la modélisation des processus
devient létape première et cruciale de la mise en forme dun système
dinformation. Il en résulte une articulation précise du système
dinformation aux modes de travail de chaque métier. Pour que cette articulation
soit réussie, il faut que les métiers simpliquent activement dans la mise en forme
et la maîtrise de leurs processus, et quils adhèrent à la démarche
délucidation des processus que nous avons décrite.
Pour illustrer ce changement, nous
décrirons deux " modèles " appelés M1 et M2.
Dans M1, qui décrit les pratiques anciennes, le système dinformation se
construit autour des applications informatiques. Dans M2, le système
dinformation se construit autour des processus des métiers.
Le rôle de linformatique change lors
du passage de M1 à M2 (3). Il est bien évident que ce changement
nest pas facile, mais toutefois il nest pas impossible : à lissue
de ce changement, utilisateurs comme informaticiens se trouvent dans un monde où leurs
responsabilités respectives sont mieux définies, leur coopération assainie, leur
relation fondée sur le respect mutuel et la reconnaissance de lexpertise de
lautre.
Il est vrai que pour en arriver là il faut
rompre avec des habitudes toutes différentes, ce qui daventure peut nécessiter
quelques changements de personnes et dorganigramme, de ces changements qui sont à
la fois espérés et craints de toute organisation, et qui ne se passent jamais aisément.
Modèle M1 : les applications
Une application, cest une suite de
traitements appliqués sur des données initiales (" input ") pour
fournir un résultat (" output "). Les données initiales sont soit
introduites dans lapplication par saisie ou comptage automatique, soit issues
dautres applications. Les traitements sont soit des tris et additions permettant de
mesurer des agrégats à partir de données détaillées, soit des calculs plus
spécifiques (4).
Le fondement dune application, tel
que le définit Merise, réside dans deux modèles : le modèle conceptuel de données
comprend les définitions sémantique (5) et technique (6) des données ; le modèle
applicatif décrit les traitements.
Nous allons décrire deux scénarios de
mise en uvre du modèle M1 : le premier,
" rose ", montre comment les choses sont censées se passer. Le
second, " gris ", montre comment elles se passent trop souvent.
Scénario " rose "
Lapplication, dont la définition est
fondée sur une expression des besoins des utilisateurs sobre, pertinente et sur des
priorités clairement exprimées, limite la saisie au strict nécessaire, automatise les
traitements, et affiche sur lécran (ou imprime sur papier) les résultats dont
lutilisateur a besoin. La récupération des données issues dautres
applications est automatique, seules les données nouvelles faisant lobjet
dune saisie manuelle.
Linformaticien, qui reçoit les
demandes de divers utilisateurs, construit son architecture de données et de traitements
sous une double contrainte de qualité (7) et déconomie. Il répartit ainsi les
ressources (mémoire, puissance de calcul, débit des liaisons télécoms) et définit des
applications intermédiaires, ainsi que larchitecture des systèmes
dexploitation et langages. La cohérence des applications est alors réalisée au
sein du système informatique, cur du système dinformation.
La qualité de lécriture des
programmes garantit quil sera facile de les faire évoluer lorsque les besoins
changeront.
Scénario " gris "
Lurgence, linsouciance,
loptimisme, le cloisonnement de lorganisation poussent à concevoir et
développer les applications au coup par coup, selon larrivée des demandes, sans
que la relation avec les autres applications soit maîtrisée ; des données de
référence (8) sont redéfinies pour chaque application ; les plates-formes techniques
(machines, système dexploitation, langage) sont choisies en fonction des ressources
disponibles lors du développement ; les interfaces présentées à lutilisateur
sont hétéroclites (touches de fonction et codages spécifiques à chaque application).
La " gestion de
configuration " (documentation des versions successives dune application)
est laissée à la bonne volonté des chefs de lignes de produits, et certains la
négligent. Beaucoup dincidents restent inexpliqués.
Les métiers utilisateurs ont peu de prise
sur lévolution du système dinformation, que linformatique prétend
piloter. Même si le cérémonial du programme budgétaire annuel du système
dinformation prévoit une sélection parmi les projets présentés par les métiers,
et une discussion de leur utilité respective, rien ne garantit que ce programme sera
effectivement réalisé. Dailleurs le budget qui lui est consacré nest pas un
budget des métiers (qui ensuite considéreraient linformatique comme un
fournisseur), mais le budget de linformatique, qui reste maître de
laffecter selon sa propre analyse des priorités, que sa technicité protège des
contrôles, et qui dailleurs se refuse à fournir des reportings permettant de
contrôler le respect de ses engagements.
Lentreprise, pour sa part, considère
linformatique comme un centre de coût, non comme un centre dinvestissement au
service des métiers. La pression budgétaire est exercée de façon mécanique et aveugle
par une " enveloppe informatique ".
Une méfiance se crée entre les
informaticiens et lentreprise. Les engagements sur les coûts et délais ne sont
jamais tenus.
Linformatique se divise en baronnies jalouses de leur indépendance :
cette division est la sanction du désordre, et elle est sans doute politiquement
opportune envers les métiers dans la mesure où elle interdit la clarté des reportings.
Modèle M2 : les processus
Le terme de
" processus " désigne lenchaînement des tâches réalisées
pour remplir une fonction de lentreprise. Ces tâches sont soit mentales
(perception, jugement, décision) soit physiques (imprimer un billet, le donner à un
client, réaliser une opération de maintenance), les tâches mentales préparant les
tâches physiques (9). Le système dinformation vise à assister lutilisateur
dans la réalisation des tâches mentales liées aux processus, dans la logique du travail
assisté par ordinateur.
Exemple dinterface utilisateur (10)
Formaliser un processus conduit à
léquiper dun " workflow ", cest-à-dire dune
documentation explicite des tâches et de leurs relations :
préciser les interfaces
nécessaires à chaque activité (on regroupe sur le même écran les plages de
consultation et de saisie nécessaires à une activité, ce qui évite à
lutilisateur la connexion à dautres applications, ainsi que la navigation
dans des codes et touches de fonction diverses),
programmer les tables dadressage
permettant de router automatiquement les messages à lissue dune tâche
(lorsque lutilisateur tape sur la touche " valider " qui marque
la fin de son travail, il na pas à chercher à qui envoyer le résultat).
Le délai de réalisation dune tâche
est surveillé par un " timer " qui prévient lutilisateur en
cas de dépassement, ou qui reroute le message vers un autre utilisateur (11).
Modéliser un processus, cest
décrire la succession des tâches qui concourent à une mission : ce que fait chaque
acteur, les données quil manipule, les traitements quil ordonne, les délais
dans lesquels son travail doit être exécuté, le routages de ses messages vers les
autres acteurs, les compteurs qui permettent au responsable du processus den
contrôler la qualité.
La réalisation physique des tâches est
décrite dans le modèle, puisquil la documente, mais elle nécessite une action qui
ne peut être réalisée que par un être humain et échappe donc à lordinateur
même si celui-ci aide sa préparation. Le workflow aide lutilisateur sans se
substituer à lui, même sil automatise des tâches que lon faisait
auparavant à la main.
Organisation transverse
Les fonctions de la hiérarchie
intermédiaire (transmission des consignes vers le bas et des rapports vers le haut) sont
remplacées par le workflow, ses compteurs et lédition semi-automatique des comptes
rendus. Le nombre des niveaux hiérarchiques est donc réduit, la communication entre
" base " et " sommet " devient plus facile. Par
ailleurs, lapproche par les processus est " qualifiante ", car
elle facilite lacquisition de compétences nouvelles par les acteurs du processus
(cf. lannexe " Infotel ").
La transparence, la diffusion de linformation suppriment lopacité des
procédures, la rétention, les mille abus que ces pratiques permettent.
Processus et objets
Pour décrire une interface utilisateur, il
suffit dindiquer les données que celui-ci consulte, celles quil saisit, les
traitements quil lance, ainsi que lordre (éventuellement souple) dans lequel
il réalise ces opérations. Chaque utilisateur va consulter ou saisir quelques données,
déclencher un nombre limité de traitements : ceci conduit naturellement vers la
programmation orientée objet.
Le langage UML (12), qui fédère les
langages de modélisation en matière dapproche objet, fournit les documents
nécessaires pour décrire les activités (" use cases " selon
le vocabulaire de Jacobson), les classes (" diagrammes de classes ")
et la succession des opérations (" diagrammes de séquences "). On
construit ainsi un " modèle complet " qui, établi par un maître
douvrage et communiqué au maître duvre informatique, indique à ce
dernier ce qui doit apparaître sur les écrans des utilisateurs, les actions que ceux-ci
vont réaliser, ainsi que les compteurs utilisés à des fins de contrôle.
Le modèle complet des processus est
plus précis que les spécifications fonctionnelles fournies à linformatique dans
le modèle M1. Il indique sans ambiguïté ce que lutilisateur veut
faire, et aide à découper le développement en petits modules, les classes, clairement
reliées chacune à une finalité pratique (cest pour cela que lon parle
d" objets métier ").
Lanalyse des activités fait
apparaître que les mêmes classes sont utiles à plusieurs acteurs ou que lon peut
satisfaire les besoins de plusieurs acteurs en construisant des classes dont la forme
logique est identique ou analogue (héritage, polymorphisme). Elle fait également
apparaître que les mêmes classes sont souvent articulées au sein de
" composants " qui les regroupent, ce qui permet de fédérer les
interfaces. Ces analogies et regroupements font apparaître des êtres sémantiques
nouveaux concrétisant des concepts inédits. Les langages de développement
" orientés objet " exploitent ces possibilités qui allègent le
développement au bénéfice de la conception. Ils réduisent les coûts de maintenance et
facilitent lévolution du système dinformation.
La mise en uvre du modèle par
linformatique suppose que les développements soient réalisés en utilisant un des
langages qui supportent le formalisme objet (Java, C++). Une articulation intelligente
entre les outils de développement et les langages de modélisation UML permet de bien
maîtriser la documentation des versions successives, les mises à jour à introduire lors
des évolutions, et facilite donc lévolutivité du logiciel selon les versions
successives du modèle métier.
Les échanges de messages entre objets ou
avec les bases de données sont réalisés par un " broker " (13) qui
traite les problèmes dadressage, de transcodage, ainsi que les questions délicates
de " persistance " pendant la durée de la transaction (notamment les
questions de " concurrence " qui se posent lorsque deux utilisateurs
travaillent en même temps sur le même composant ). Ceci suppose aussi que
linformatique soit capable de dominer larticulation du monde objet avec les
anciennes applications, dont ladaptation à lobjet prendra plusieurs années.
Les techniques à maîtriser pour assurer un service de qualité convenable en univers
hétérogène sont délicates, et nécessitent un professionnalisme élevé des
informaticiens.
Si cette nouvelle conception de
linformatique implique lacquisition de compétences nouvelles de la part des
informaticiens (apprentissage des langages Java et C++, de la maîtrise des
" brokers " et du middleware, de la programmation des interfaces (Java
et HTML), de larticulation de la gestion de configuration avec les modèles métiers
en UML), elle offre à la profession informatique un terrain dexpansion nouveau et
une forme de coopération intéressante avec les utilisateurs. La plupart des
informaticiens considèrent cette évolution avec intérêt.
Passage de M1 à M2
Le passage de M1 à M2
suppose un changement, tant pour le système dinformation que pour
lorganisation.
La responsabilité du système
dinformation passe de linformatique, qui la détenait traditionnellement, aux
métiers qui définissent son contenu fonctionnel en modélisant leurs processus.
Linformatique cesse dêtre un
centre de coûts et devient centre dinvestissement au service des métiers.
Lentreprise renonce à la notion d " enveloppe
informatique ".
Le soutien aux utilisateurs, qui confine
aujourdhui trop souvent au bizutage, devient lactivité prioritaire de
linformatique. Les éléments essentiels du système dinfor-mation sont les
processus, objets et composants, non plus les applications.
Ces changements de priorités ont des
conséquences sur la façon dont les informaticiens perçoivent leur rôle.
Transition de lorganisation
Lapproche par les processus fait
passer lentreprise du contrôle a priori (" le chef signe
tout ") au contrôle a posteriori (" on agit dabord, on
fait le debriefing ensuite "), de lopacité à la transparence (les
retards deviennent visibles, quil sagisse de la signature du décideur ou du
travail de lexécutant), de la rétention à la diffusion dinformation.
Il ne faut pas sous-estimer les
difficultés de cette évolution. Ceux qui pratiquent la rétention dinformation,
qui se protègent sous lopacité des procédures, ne sont pas pour autant de
mauvaises gens : ils se sont adaptés à lentreprise et se protègent contre son
comportement spontané. Passer de M1 à M2 suppose une traversée du
désert pendant laquelle ils ne bénéficieront plus des protections que comporte M1
et nauront pas encore atteint léquilibre que permet M2.
Lexhortation morale serait ici
dérisoire : cet effort nest raisonnable que si chacun comprend quil peut y
gagner personnellement. La communication, au sens médiatique du terme, est un épisode
crucial de la migration. Il faut susciter lespoir, éveiller lintuition, avant
de chercher à régler les problèmes techniques : ils se régleront souvent
deux-mêmes (ou plutôt ils seront réglés dans la foulée) si lespoir est
présent.
Processus et système dinformation
Dans M1, la définition des
applications reposait sur l" expression de besoins ". Elle
suppose une interprétation du travail à faire par les utilisateurs, mais cette
interprétation nest pas nécessairement explicite et reste donc abstraite.
Rien ne garantit quelle permettra un bon contrôle du processus puisquelle
nest pas construite pour cette fin.
Si lon considère les processus, on
ne part pas de la question " quels sont les résultats quil me faut pour
travailler ", mais de la question " comment est-ce que je
travaille " : on découvre alors que tel processus ne boucle pas, ou nest
pas contrôlable, ou comporte une redondance (un même travail repris plusieurs fois), que
certains points sont fragiles (lorsquune décision dépend dun avis externe
dont le délai nest pas contrôlable). Structurer le processus rend visibles
certains phénomènes: un acteur doit répondre à un message dans un délai donné, ou
bien la décision lui échappera. Cen est fini des rétentions dinformation et
de signature qui constituaient autant de monnaies déchange.
Système dinformation et système informatique
Le système dinformation est
essentiellement sémantique et fonctionnel ; il est défini par le " modèle
complet " en langage UML, qui fait abstraction des moyens techniques. La
maîtrise douvrage doit se doter dune expertise spécifique, fonctionnelle,
garantissant la pertinence des demandes en regard des exigences du métier.
Le système informatique, par contre,
organise ces moyens ; il choisit les plates-formes, langages, interfaces, architectures
(centralisée, client serveur à deux ou trois niveaux), la localisation des traitements
et mémoires, les niveaux de conservation des données, la couche de middleware et la
gestion de la persistance. Il repose sur une expertise attentive à la diversité des
outils du marché, aux innovations, à la pérennité des solutions.
Dans M1, la frontière entre
maîtrise douvrage et maîtrise duvre était confuse : certes la
première était responsable de lexpression des besoins, et la seconde de la
réalisation technique ; cependant la solidarité des applications, et donc du système
dinformation, se concrétisait au sein de linformatique. La tentation était
alors grande de confier à celle-ci davantage quune mission de maîtrise
duvre, et den faire le concepteur du système dinformation se
substituant aux utilisateurs pour définir leurs besoins.
Dans M2, la séparation devient
claire. A lun la responsabilité du modèle complet, à lautre celle de la
solution technique. Cette répartition ninterdit pas le dialogue, au contraire elle
ne nécessite : la maîtrise douvrage doit sintéresser aux solutions
techniques qui étendent le domaine du possible fonctionnel, le maître duvre
doit avoir des idées sur ce qui est utile au plan fonctionnel et les exprimer. Cependant
à ce dialogue succède la décision, et alors chacun doit prendre ses responsabilités
propres, dans son domaine propre.
Processus et qualité
A partir du moment où la conception du
système dinformation de lentreprise pivote autour de la notion de processus,
on doit sinterroger sur la relation entre processus et qualité.
On peut voir la question sous deux angles :
la qualité du processus ; lapport de lapproche par les processus à la
démarche qualité
Qualité du
processus
Un processus, dans une entreprise,
cest dabord un état de fait : lenchaînement des tâches qui visent à
produire de la valeur, qui sont déclenchées par un événement extérieur au processus
(commande dun client, décision dun responsable) et qui se terminent par un
événement extérieur au processus (livraison dun produit, remise dun
rapport, etc.).
La notion de
" livrable " est utile pour désigner les produits (au sens large :
rapports écrits, logiciels, comptes rendus, produits physiques etc.) par lesquels
sachève un processus.
Un processus comporte des sous-processus
dans la mesure où sa progression nécessite la production de plusieurs livrables : ainsi
dans un projet complexe la livraison de divers blocs de logiciels scande la réalisation
du produit.
Lapproche du système
dinformation par les processus vise à rendre explicite la structure du processus,
cest-à-dire non seulement lenchaînement des tâches mais aussi les délais
impartis à chaque étape, lidentification des personnes auxquelles il faut envoyer
un message lorsquune étape est terminée pour quelles puissent commencer leur
travail, les délais ou autres indicateurs de qualité quil convient de mesurer, et
les personnes responsables du contrôle du processus auxquelles ces indicateurs doivent
être envoyés.
Il sagit donc de documenter le
processus, et de léquiper des indications qui lui permettent de fonctionner
automatiquement et dêtre contrôlé :
plan de lenchaînement des
tâches ;
interfaces propres à la
réalisation de chaque tâche, permettant daccéder aux données et objets
correspondants ;
- " timers " qui
programment le délai maximum imparti à chaque tâche ;
tables dadressage qui
indiquent ladresse à laquelle le travail doit être transmis lorsque la tâche est
achevée ; ces tables indiquent aussi les personnes à qui il faut envoyer la tâche si le
timer a été dépassé ;
compteurs et indicateurs permettant
le contrôle du processus ;
outil dadministration
comportant lenregistrement des adresses auxquelles il convient de faire parvenir les
indicateurs.
Bien souvent, les processus " de
facto " (qui nont pas été équipés en termes de système
dinformation) présentent des défauts que le système dinformation doit
corriger.
Lapproche du système
dinformation par les processus permet de repérer les défauts des processus
opérationnels et donc de les corriger.
Apport de
lapproche par les processus à la démarche qualité
En outre le fonctionnement du processus
engendre, si le processus a été convenablement doté doutils de contrôle, une
production dinformation qui sert à contrôler la qualité du processus : mesure des
délais, mesure des volumes de flux, mesures de qualité.
Ces indications peuvent servir au
propriétaire du processus, qui définit alors les actions nécessaires pour redresser
déventuelles mauvaises pratiques ou dérives en cours.
Le pilotage dun processus se fait
typiquement a posteriori. Les opérateurs disposent dun devoir dinitiative et
des droits correspondants, laccent étant mis sur la fluidité et la rapidité du
fonctionnement du processus. Cependant il faut que ce fonctionnement soit contrôlé pour
éviter les dérives ; il le sera a posteriori, le propriétaire recevant les mesures des
indicateurs et prenant les mesures nécessaires, soit en agissant sur les réglages du
processus, soit en communiquant avec les acteurs pour leur indiquer les corrections à
apporter à leurs pratiques.
Les indicateurs fournis par le
fonctionnement du processus peuvent aussi servir à dautres fins. Ils constituent
une source dinformation fine, en temps réel, qui peut être exploitée pour faire
des comptes rendus destinés à divers types de responsables.
Ainsi, le processus de la relation
clientèle peut fournir à une entreprise des indicateurs qui vont alimenter des comptes
rendus définis :
- par région, à lintention des
directeurs régionaux, en fournissant des tableaux comparatifs entre les régions pour que
chacun puisse se situer par rapport à la moyenne;
- par produit, à lintention des
chefs de ligne de produit, pour que chaque produit puisse être suivi dans son évolution.
Les comptes rendus utilisent une
présentation synthétique de linformation (graphiques, petits tableaux de nombres)
et privilégient la présentation sous forme de série chronologique pour faire
apparaître les évolutions (qui souvent importent plus que les niveaux). Ils comportent
des commentaires, qui paraphrasent le graphique ou lui apportent un complément
explicatif. Enfin, ils comportent la citation dexemples illustratifs précis
" en texte intégral " (par exemple : lettre de réclamation
particulièrement typique), choisis pour leur représentativité et permettant de donner
à linformation un contenu concret et vivant.
La tâche de préparation et diffusion des
comptes rendus, qui suppose lélaboration de tables de diffusion et la gestion des
droits daccès à linformation, est une tâche de type éditorial qui requiert
des compétences intellectuelles élevées.
Mise en uvre pratique
Les considérations ci-dessus ne sont pas
" théoriques " ni " à long terme ". Elles ont un
rapport direct avec la réalité concrète des tâches quotidiennes et les urgences de
lentreprise.
Du point de vue applicatif
La conception habituelle du système
dinformation, qui se concentre sur " les applications ", est peu
pratique et coûteuse. En effet lorsque lon suit cette approche, la priorité
nest pas dexpliciter, documenter et maîtriser la succession logique et
chronologique des tâches accomplies par les utilisateurs, mais de leur présenter des
informations et outils de traitement censés leur faciliter la tâche. La mise au point
des applications est scandée par le calendrier budgétaire, et suit une procédure plus
formelle et administrative que rationnelle (14).
Rien nempêche en principe de
sintéresser aux tâches accomplies par les utilisateurs lorsque lon
développe et maintient une application. Dans un monde idéal la remarque ci-dessus ne
sappliquerait pas (15). Cependant en pratique les applications sont conçues
sans que lon considère le processus que constitue la succession de ces tâches.
On sefforce de supprimer les
dysfonctionnements en perfectionnant, enrichissant, compliquant les applications, ou
encore en achetant des progiciels sur le marché, censés apporter la solution de tous les
problèmesn(16). Mais tout le monde est mécontent : les managers voient la persistance
des dysfonctionnements malgré des efforts coûteux, les utilisateurs disent que
linformatique répond mal à leurs besoins, linformatique pense faire son
devoir et sétonne quon lui fasse des reproches. En somme, chacun fait de son
mieux et cela ne marche pas.
Du point de vue des processus
La réponse réside dans un changement de
perspective :
Il faut demander au système
dinformation non de fournir des applications, mais déquiper les processus de
travail des utilisateurs.
Cest déjà possible avec les outils
que fournit le marché. Mais rien nest plus difficile que de changer de point de
vue. Des problèmes quil serait parfaitement possible de traiter restent en plan,
parce que :
lapproche par les processus
nest pas familière,
la compétence en la matière
nest pas assez répandue (17),
cette approche conduit à modifier
les méthodes de travail et suscite naturellement des réticences.
Exemples
Nous décrirons dabord les apports
dun workflow et de la documentation partagée, puis nous donnerons un exemple
opérationnel.
Nous verrons apparaître des fonctions
nouvelles : animateur de forum, administrateur de processus, etc.
Gérer les dépenses
Il est facile dutiliser Lotus Notes
pour outiller le processus de traitement des demandes dautorisation dachat
(DAA) et les demandes dautorisation dinvestissement (DAI), ainsi que pour la
préparation du budget. Tous ces processus sont analogues: une demande est formulée par
quelquun, elle doit être validée par le responsable hiérarchique, vérifiée par
le contrôle de gestion, puis éventuellement soumise à des avis dexperts, enfin
proposée à lapprobation dun décideur ; des tableaux doivent être
construits pour obtenir une vue synthétique des budgets demandés et accordés, des
engagements de dépense etc.
Nous allons ici décrire en détail la
façon dont les choses se passent, puis comment elles se passeraient si lon
utilisait un workflow.
Sur papier
Les dossiers sur papier sont établis selon
des formats variables, les calculs sont parfois erronés, des allers retours avec le
demandeur sont nécessaires pour obtenir une formulation compréhensible de la demande.
Puis le dossier part dans le circuit des avis et signatures. Il peut rester longtemps sur
un bureau, le traitement des dossiers papier se faisant selon le mode LIFO qui suscite des
délais aléatoires. Il est difficile de savoir où en est un dossier. Certains font
attendre longuement une signature quils utilisent comme monnaie déchange dans
leurs négociations. Il arrive quun dossier se perde.
Les comptes résultant de ce flux
daffaires sont établis par des personnes qui se trouvent en fin de processus, en
général au contrôle de gestion, et utilisent des tableurs. Des erreurs de saisie sont
possibles, ainsi que des oublis matériels. Des vérifications et recoupements sont donc
nécessaires. Ils consomment un temps de travail important, et ne suppriment pas toute
incertitude.
Avec un Workflow
Les dossiers électroniques sont établis
sur des masques de saisie qui comportent une aide en ligne, les calculs (totaux, taux de
rentabilité, ratios, reports etc.) sont faits automatiquement, les données de
référence (montant du budget disponible, nomenclatures etc.) sont fournies par des
services contextuels. Le dossier comporte une indication sur lurgence et le délai
souhaité de traitement.
Lorsquune activité est terminée, le
dossier est transmis automatiquement vers lactivité suivante, dont
lutilisateur est prévenu par une alerte sur son écran. La file dattente des
dossiers à traiter tient compte de leur urgence. Lutilisateur consulte le dossier,
le traite, note ses avis et décisions, les authentifie par une signature électronique.
Le délai de traitement du dossier par une activité est programmé ; si le dossier
nest pas traité dans les délais, il sera routé vers une autre personne. En cas de
non traitement persistant, une alarme est émise vers le responsable du processus.
Les droits daccès aux documents ou
à des parties des documents sont gérés par ladministrateur du processus. Une
personne autorisée peut, à tout moment, consulter le workflow pour savoir où en est un
dossier, connaître les avis donnés, et intervenir si nécessaire.
Le processus articule plusieurs
sous-processus (demandes dexpertise etc.), mais il boucle finalement sur la réponse
à la demande initiale. La réponse à une demande budgétaire, cest le montant
accordé. La réponse à une demande dachat, cest la livraison du bien
demandé, qui doit faire lobjet dun message de la part du demandeur.
Le propriétaire du processus reçoit
régulièrement des statistiques : affaires traitées classées par nature, histogramme
des délais, montants concernés selon les nomenclatures comptables, incidents, anomalies,
etc. Il a les moyens de repérer les activités qui dépassent souvent les délais, et
peut soit allonger le délai qui leur est accordé, soit émettre un rappel à
lordre.
Soulignons que la description ci-dessus ne
relève pas de la science fiction, mais correspond à létat de lart
daujourdhui : dès quune entreprise utilise des PC en réseau, et si
elle a installé sur ces PC une plate-forme comme Lotus Notes, elle peut utiliser le
workflow.
Documentation
La documentation papier présente de
nombreux défauts : on ne sait jamais si elle est à jour, elle ségare le long des
circuits de diffusion, les versions successives sempilent souvent sans classement,
il est difficile dy faire des recherches.
La documentation électronique résidant
sur un serveur accessible via le réseau est toujours consultable et à jour. Elle est
dotée doutils facilitant la recherche. Le document électronique peut être
imprimé si lon veut lutiliser commodément.
La documentation électronique est
complétée par un forum où les utilisateurs peuvent poser des questions et recevoir des
réponses. Un animateur du forum veille à ce que les réponses soient fournies
rapidement, et purge le forum des redondances ou banalités. Progressivement, le forum
entoure la documentation dun commentaire précieux (18).
Entreprise étendue
Lexpression " entreprise
étendue " désigne une entreprise dont le système dinformation
communique avec celui de ses clients, fournisseurs et partenaires.
Historiquement, les premières entreprises
étendues se sont mises en place grâce à lEDI entre grandes entreprises et
fournisseurs réguliers (constructeurs automobiles et fabricants de pièce détachés) :
il sagissait de faire communiquer des applications informatiques.
LExtranet permet de faire communiquer
des processus, ce qui introduit une souplesse et une puissance nouvelles dans
lentreprise étendue.
Le processus essentiel est celui de la
relation commerciale. Vers les partenaires et les fournisseurs se bouclent des
sous-processus qui permettent de constituer loffre.
Les apports dune gestion du processus
à la relation avec les fournisseurs sont connus (19) notamment dans le cas des pièces
détachées.
Le fonctionnement dun partenariat
demande dune part un bon raccordement des processus opérationnels, et la
transparence du processus de répartition des coûts et recettes. Si le processus
opérationnel ne marche pas, le partenariat est inopérant. Si le processus financier est
opaque, le partenariat sera peu durable, car il sera pollué par la fraude ou le soupçon
de fraude.
Autres exemples
Citons quelques autres dispositifs utiles
et dont limplantation ne pose aucun problème technique (mais sans doute des
problèmes dorganisation).
1) Relevé des décisions prises lors
dune réunion, validé par la personne qui présidait cette réunion, accessible aux
participants à la réunion, bouclant sur le compte rendu dexécution des
décisions.
2) Relation entre informatique et
utilisateurs : équiper le processus de traitement des demandes des utilisateurs de sorte
que linformatique puisse gérer les files dattente des travaux selon le degré
durgence de la demande, et que lutilisateur sache où en est le traitement de
sa demande.
3) Mise à disposition des résultats
statistiques (enquête sur la satisfaction des passagers, statistiques commerciales,
statistiques commerciales etc.)
4) Traitement des réclamations : un
workflow permettrait de contrôler le délai de traitement, détablir
automatiquement des statistiques etc.
5) Gestion des incidents : il est
avantageux de mettre la documentation sur support électronique, et de la compléter par
un relevé des incidents permettant détablir des statistiques et de faire évoluer
les procédures.
6) Le commissariat implique divers acteurs
(Servair, escales, partenaires, réservation) dont les actions doivent être coordonnés
pour éviter les gaspillages.
7) Indicateurs : un Datawarehouse
permettrait de constituer et documenter les agrégats. Un workflow ferait circuler
synthèses, graphiques et commentaires.
8) Régulation : il manque un processus
assurant la réactivité de la chaîne de production à la disponibilité des ressources.
Le cloisonnement des applications a conduit a sous-estimer le besoin de communication
entre informations dorigines diverses.
9) Formation professionnelle : les stages
devraient être complétés par du télé-enseignement (accès aux supports de cours,
auto-évaluation, forum).
Conclusion
Lapproche de lentreprise par
ses processus est cruciale pour le suivi de la qualité, pour la clarté du partage des
responsabilités et des rôles, pour la maîtrise de la production de valeur, etc.
Cette approche ne porte tous ses fruits que
si elle est articulée à la définition du système dinformation, dont elle devient
une étape essentielle.
Dès lors la maîtrise douvrage
devient responsable de la modélisation de ses processus, tâche pour laquelle le marché
offre des outils efficaces. Linformatique est maître duvre de la
transcription de ces modèles métiers en programmes, de préférence en utilisant les
langages orientés objet, et de la fourniture des services correspondants sur une
architecture performante.
Il en résulte une reformulation, sur des
bases solides et claires, du rôle du système dinformation dans lentreprise,
ainsi que du rôle des acteurs impliqués dans la définition et lexploitation de ce
système.
Litinéraire ainsi décrit ne relève
pas de la science fiction, comme peuvent le croire ceux qui ne suivent pas
lactualité, mais de la réalité technique et professionnelle
daujourdhui. Les entreprises les plus performantes utilisent les procédés
que nous avons décrits, qui sont devenus chez elles des banalités sur lesquelles on ne
sinterroge plus.
Une entreprise reste libre, bien sûr, de
refuser cet itinéraire si elle estime que les adaptations quil suppose sont trop
lourdes, ont des conséquences " politiques " trop délicates et
risquent de " poser trop de problèmes de personnes ". Cest un
choix stratégique, et il peut se justifier : on juge parfois en médecine létat du
malade trop grave pour lui appliquer le traitement qui serait salutaire pour
dautres. Mais il importe que ce choix soit fait lucidement, avec une vue claire de
ses implications.
Notes
(1) Lentreprise sen remet
alors à la chance et à des exhortations morales (" soyez sérieux, honnêtes,
dévoués, uvrez pour le bien de lentreprise ") qui sont
pathétiques lorsque des pratiques corporatistes ou claniques traditionnelles les
contredisent.
(2) Les grandes SSII, les
consultants, les entreprises ont perçu au début de 1997 que les outils nécessaires à
une nouvelle approche étaient arrivés à maturité (workflow, langage UML de
modélisation orientée objet, langages de programmation orientés-objet etc.). Ils ont
également perçu que la mise en uvre simultanée de ces outils impliquait un
changement de rôle de linformatique.
(3) Nicholas Negroponte
" Being Digital " Alfred A. Knopf 1995
(4) si les données élémentaires
sont les coordonnées des sommets dun polygone, il faut un calcul pour évaluer la
surface de ce polygone ; et la surface de plusieurs polygones peut être additionnée
(agrégée), par exemple pour calculer la superficie dune propriété.
(5) définition, type de donnée
(quantitative, qualitative, ordinale, cardinale etc.), champ dobservation, grain de
détail, périodicité de lobservation, etc.
(6) format, méthode
destimation des données manquantes, délai de mise à jour, conditions de la
consultation (temps réel, temps différé), droits daccès, etc.
(7) fiabilité (absence de pannes),
délai de la mise à jour, rapidité de la réponse.
(8) données partagées par plusieurs
applications, et qui devraient donc être répliquées dans ces applications à partir
dun lieu de stockage et de mise à jour unique : nomenclatures, taux de change etc.
(9) ainsi dans la conduite dune
voiture la perception (je vois le feu rouge), le jugement (il faut marrêter), la
décision (je veux marrêter) préparent laction (je freine) et son résultat
(la voiture sarrête).
(10) A gauche une colonne de boutons
dappels de services (en haut services contextuels, en bas services génériques). A
droite des indications relatives à lactivité, avec des plages de consultation et
de saisie.
(11) Voici une règle de reroutage
typique : si X na pas traité le message dans le délai voulu, router vers Y
(collaborateur de X). Si chez Y le délai est de nouveau dépassé, router vers Z
(supérieur de X). Ce type de règle permet dassurer un traitement rapide des
dossiers.
(12) " Unified Modeling
Language " ; cf. Martin Fowler " UML distilled "
Addison Wesley 1997. Un des outils utilisables pour se servir dUML est
" Paradigm + " de Platinum.
(13) exemples de produits du
marché : Tuxedo de BEA, Orbix dIona.
(14) nous tenons à la disposition
des sceptiques les preuves étayant cette affirmation.
(15) de même, dans un monde idéal
les développeurs sorganiseraient pour pouvoir réutiliser les logiciels quils
produisent, et certains le font dailleurs ; mais dans le monde réel la plupart
dentre eux ne le font pas, et les langages orientés-objet ont été conçus pour
faciliter la réutilisation.
(16) après quoi il faut les
paramétrer, les adapter, les maîtriser, et leur mise en uvre provoque des coûts
imprévus.
(17) peu de personnes maîtrisent les
techniques de lIntranet, du Datawarehouse, etc. Lotus Notes est considérée par IBM
comme " linterface universelle daccès au système
dinformation ", et fournit une plate-forme de communication et de
développement commode et bien équipée : très peu de gens savent lutiliser.
(18) ainsi les forums mis par les
fournisseurs de logiciels à la disposition des développeurs contiennent, au bout de
quelque temps, les réponses qui permettent de traiter les " bogues "
du logiciel, et les astuces qui aident à en tirer le meilleur parti.
(19) Pascal Eymery, " La
logistique de lentreprise " Hermès 1997.
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