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« Modéliser » l’entreprise
20 septembre 2004

Liens utiles

- Modéliser le système d'information

- Méthode de modélisation

Le modèle d’une entreprise doit pouvoir être partagé par les divers acteurs que comporte cette institution : il doit être explicite. Modéliser l’entreprise, ce sera donc d’abord documenter les tâches qui y sont réalisées tant par l’être humain que par l’automate (le modèle, notons-le, ne doit pas se limiter à la description des tâches automatisées car seule une partie des tâches assurées par l’entreprise est réalisée par l’automate).

Ce travail documentaire suppose que l’on clarifie le vocabulaire, que l’on explicite les procédures et les contraintes auxquelles elles doivent obéir, ainsi que les rôles et responsabilités des acteurs. Il comporte donc une mise en ordre du langage (suppression des homonymes et synonymes, mise en lumière des concepts fédérateurs) comme de l’organisation (clarification des missions des entités, de l’attribution et de l’enchaînement des tâches).

Contenu du modèle

Le socle sémantique du modèle est le référentiel, qui enregistre le vocabulaire de l’entreprise (identifiants, nomenclatures) et ses règles de gestion.

L’urbanisme du SI est une modélisation globale de l’entreprise : il identifie ses grands domaines de production et, à l’intérieur de ces domaines, les processus et leurs relations mutuelles (certains processus sont « transverses » à des domaines différents).

Enfin, chacun des processus de production doit lui-même être modélisé, pour documenter l’enchaînement des activités humaines et des opérations informatiques, ainsi que le cycle de vie et les règles de gestion des dossiers (dénommés « objets » en informatique) que le processus manipule.

Le modèle d’un processus doit spécifier les éléments ci-dessous :

-          l’événement extérieur au processus et qui le déclenche (réception d’une commande, d’une lettre de réclamation etc.) ;

-          l’enchaînement des activités qui constituent le processus, en précisant les pré-et post-conditions du passage d’une activité à la suivante ;

-          les relations entre chacune des activités et la plate-forme du SI (données saisies, données consultées, traitements lancés) : le schéma ci-dessus fait apparaître que les activités « font la ronde » autour de la plate-forme, qui assure la cohérence des données pendant le déroulement du processus ;

-          les éventuelles communications interpersonnelles entre acteurs du processus (messages, échanges de documents) ;

-          les indicateurs de volume (charge des ressources, productivité) et de qualité (respect des délais, satisfaction du client) fournis au responsable du processus et qui servent à maîtriser la qualité de celui-ci notamment à l’occasion du « bouclage » du processus (contrôle de bonne fin).

La cellule élémentaire du processus, c’est ce que nous avons nommé « l’activité » ; il est utile de la regarder de près :

Chargée de réaliser une tâche au sein du processus, l’activité met en relation l’être humain organisé (EHO) et l’automate programmable doué d’ubiquité (APU) à travers l’interface homme-machine (IHM) qui est comme une synapse entre les deux parties du système. Chacun des deux acteurs est complémentaire de l’autre : l’APU classe, trie, calcule et traite ; l’EHO écoute, comprend, explique, conçoit et décide. Enfin, alors que la centralité du SI au cœur du processus garantit la cohérence des données dans l’APU, la communication interpersonnelle des EHO favorise une autre cohérence, celle du discernement et de la décision.

Finalités de la modélisation

La modélisation obéit à deux finalités, l’une technique, l’autre intellectuelle.

Au plan technique, le modèle précise la conception du SI : son élaboration est la première étape de sa mise en place, tout comme celle du plan d’un immeuble est la première étape de sa construction. Il doit aussi préciser les conditions de fonctionnement du SI.

Au plan intellectuel, la modélisation permet à l’entreprise de partager une représentation de son propre fonctionnement : les objets, concepts, processus et référentiels de l’entreprise sont élucidés. Cette clarté permet de compenser l’obstacle à la communication et à la compréhension que représente le cloisonnement de l’entreprise en spécialités et, au plan psychologique, l’autisme professionnel si fréquent chez les spécialistes. Un modèle bien fait, et convenablement approprié par l’entreprise, permet à chacun de se représenter le cours du processus pour lequel il travaille, son propre rôle dans le processus ainsi que les rôles des autres acteurs, enfin les relations entre les divers processus de l’entreprise.

Les deux finalités sont aussi importantes l’une que l’autre, ou plus précisément elles se situent sur des plans différents où elles sont toutes deux cruciales. On a trop souvent tendance à négliger la finalité intellectuelle parce que l’on ne voit dans le modèle qu’une étape d’un projet technique.

Pourquoi modélise-t-on ?

Certaines entreprises ne modélisent pas…

Beaucoup d’entreprises ne modélisent pas : elles croient inutile de comprendre comment elles font ce qu’elles savent faire (il est vrai que personne ne sait comment son corps respire ou digère, et que cela n’empêche pas de vivre).

Lorsqu’un salarié qui arrive dans une telle entreprise est mis au travail[1], il lui est demandé d’adhérer à une organisation locale sans qu’il puisse en prendre la vue d’ensemble. Il se formera par imitation des anciens : le savoir est « dans les murs » de l’entreprise. L’architecture qui résulte des choix faits dans le passé par des organisateurs est considérée comme un état de la nature.

Lorsqu’on présentera un modèle à ce salarié, il le trouvera déroutant car le modèle relativise des conventions et règles d’organisation qu’il a l’habitude de considérer comme des absolus.

…d’autres doivent impérativement modéliser

Certaines entreprises doivent cependant impérativement modéliser : celles qui sont placées dans un contexte évolutif (concurrence, innovation technique, réglementation) et qui doivent donc être « agiles » ; ou encore celles qui partagent avec d’autres entreprises la production d’un produit (partenariats) et doivent donc assurer l’« interopérabilité » des processus.

Or aujourd’hui la plupart des entreprises se trouvent ou se trouveront bientôt dans l’un ou l’autre de ces deux cas : l’évolutivité et les partenariats sont des contraintes de l’économie actuelle. Ainsi, alors qu’autrefois les entreprises pouvaient à peu près bien marcher en inculquant à leurs salariés des habitudes professionnelles, il importe maintenant qu’elles élucident leurs processus afin que leurs salariés puissent se les approprier[2].

Voir Méthode de modélisation.


[1] Il se peut qu’alors l’entreprise « forme » le salarié. Mais la mise en scène d’une formation n’est pas la même que celle du travail ; il y a, entre la formation dans une salle de cours et l’utilisation d’un modèle sur le lieu de travail, le même écart qu’entre les verbes « comprendre » et « réaliser », ce dernier ajoutant à la compréhension l’intuition du caractère réel de ce que l’on comprend.

[2] La recherche de la productivité peut, elle aussi, conduire l’entreprise à modéliser : c’est le cas lorsque l’organisation « gravée dans les murs » n’assure plus la conformité à l’état de l’art du secteur.