Extraits de :
Jean-Yves Haberer "Cinq
ans de Crédit Lyonnais" Ramsay 1999
La question
des tableaux de bord est au coeur des
problèmes qu'a eus le Crédit Lyonnais :
p. 78
"[...] Je suis profondément malheureux de ne pas avoir,
comme à Paribas, un tableau de bord permettant de piloter en temps réel la marche de
l'entreprise [...] Pendant cinq ans, je me suis acharné, tout en sachant que je heurtais
de front l'instinct de survie de la banque commerciale à l'ancienne [...] j'ai relancé
impitoyablement François Gille pendant des années, j'ai réclamé des notes, organisé
des réunions d'office, inscrit la question aux séminaires du comité exécutif. [...] Ce
n'est pas mauvaise volonté, mais incapacité collective non seulement à exécuter, mais
à concevoir l'exécution [...] Ainsi je me trouve dans la situation du Titanic,
naviguant dans un océan parsemé d'icebergs avant l'invention du radar [...] cette
affaire des instruments de gestion est mon plus grand échec. [...] J'apprends donc la
plupart des drames de la maison par des rétroviseurs, six à neuf mois après, du fait de
la mécanique des comptes semestriels et annuels eux-mêmes décalés de trois mois."
p. 408
"Je me reproche, malgré un long combat de cinq ans pour
les obtenir, de n'avoir pas agi avec plus d'autorité, voire avec la violence de
l'instinct de survie, pour obtenir les indispensables comptes de gestion qui m'ont fait
défaut jusqu'au dernier jour".
Cependant les méthodes citées en exemple par Jean-Yves
Haberer ne sont pas exemptes de critiques : pas de correction des variations
saisonnières, pas d'analyse de tendance, comparaison à l'année précédente (méthode
lente et inexacte) ou au budget (méthode artificielle) :
p. 78
"A la Compagnie bancaire, filiale d'exploitation par
filiale d'exploitation, on dispose, quelques jours après la fin du mois, d'un compte de
gestion permettant de comparer, ligne à ligne, le budget et son exécution, jusqu'au
résultat brut, aux prévisions d'amortissement, d'impôt et de provision, et au résultat
net. Il en va de même à Paribas, quelques semaines après la fin du mois, pour chacun des
quinze principaux centres de profit. Au cumulé depuis le début de l'année j'ai même
fait ajouter le calcul, en cumulé glissant, des douze derniers mois, ce qui permet de
voir, avec une marge d'erreur de 5 % seulement, le résultat net consolidé de l'exercice
précédent se transformer peu à peu, sans avoir à corriger les variations
saisonnières, en résultat net de l'exercice en cours. On peut, centre de profit par
centre de profit, surveiller et se faire expliquer les divergences en plus ou en moins par
rapport aux prévisions budgétaires ou à l'année antérieure. On peut, surtout, prendre
des mesures à temps pour corriger une évolution défavorable".
Haberer n'est certes pas un président moderniste : son
opinion sur le micro-ordinateur le range parmi ceux qui n'ont pas compris l'apport de
cette machine :
p. 83
"[...] Je résiste [au déferlement de la technologie]
en refusant pour l'instant, par snobisme anticonformiste, la présence d'écrans dans mon
bureau. Ne faut-il pas, par l'exemple, dissuader certains cadres de se doter
d'équipements ostentatoires dont ils n'ont pas toujours un vrai besoin ?"
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