La méthode de Toyota
29 mars 2007
Des articles du New York Times ont donné d’intéressants détails sur la méthode qui a permis à Toyota de devenir le premier parmi les constructeurs automobiles[1].
Quelques slogans condensent cette méthode : « kaizen », la recherche de la qualité n’a pas de fin, l’amélioration est permanente ; « genchi genbutsu », il faut résoudre les problèmes à la source plutôt que de les cacher ou même de les faire remonter vers la hiérarchie ; « respecter les personnes », etc.
Le but de l’entreprise est « d’améliorer la société en produisant des automobiles » (le mot « société » désignant ici non pas l’entreprise Toyota, mais la vie des êtres humains en société) : c’est une mission civique en regard de laquelle le profit n’est qu’un moyen pour financer l’investissement, la recherche et la croissance.
Le modèle d’entreprise ainsi proposé se distingue donc de l’entreprise tirée par le profit, obsédée par le court terme (et en particulier par le cours de ses actions). En pratique, ce modèle a pour conséquence :
- une démarche stratégique patiente, à long terme, qui s’appuie sur l’étude méthodique des besoins de chaque segment de clientèle et sur l’amélioration sans fin (kaizen) de la qualité des produits ;
- le contrôle donné aux ouvriers sur la chaîne de production, qu’ils peuvent interrompre s’ils détectent un défaut de qualité ;
- la publicité donnée aux indicateurs, y compris aux indicateurs individuels, qui interdit de masquer les problèmes et incite à les résoudre sur le champ ;
- le respect envers les personnes et l’assistance mutuelle au sein des équipes, corollaire indispensable de la publication des indicateurs.
On retrouve dans ce modèle quelques-unes des règles fondamentales de l’entreprise qui a bien assimilé les TIC : le processus de production est entouré d’une « doublure informationnelle » (ici, les indicateurs) qui permet de le contrôler, de réagir à ses défauts et de l’améliorer.
Ce modèle fonctionne-t-il ? Oui, puisqu’il a permis à Toyota de réussir dans un secteur ou d’autres entreprises sont en difficulté.
Est-il sincère, ou n’est-il qu’un déguisement pour une entreprise qui serait, comme toutes les autres, tout simplement avide de profit ? Pour répondre à cette question, il faudrait savoir sonder les reins et les cœurs. Observons toutefois que réduire l’entreprise à la recherche du profit, c’est peut-être réaliste, mais d’un réalisme un peu court et qui risque de rater sa cible.
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Toyota rencontre toutefois des difficultés car l’expansion de l’entreprise au niveau mondial lui impose de s’adapter à des cultures diverses. Il faut désormais expliciter et formaliser des choses qui allaient sans dire ou qui pouvaient se transmettre oralement entre Japonais. La qualité de service reste médiocre chez certains concessionnaires en Chine et en Inde et dans certaines usines le management a renâclé à donner le contrôle de la chaîne de production aux ouvriers : il en est résulté des problèmes de qualité et il a fallu rappeler certaines Toyota pour réparation.
Toyota s’active donc pour former ses managers, et s’y applique avec la même intensité que pour la conception des voitures.
[1] Martin Fackler, « The ‘Toyota Way’ Is Translated for a New Generation of Foreign Managers », The New York Times, 15 février 2007 ; Jon Gertner, « From 0 to 60 to World Domination », The New York Times, 18 février 2007.
Pour lire un peu plus :
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http://www.volle.com/travaux/toyota.htm
© Michel VOLLE, 2007
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