État de droit
15 juillet 2001
Dans quel état se trouve notre État de droit ?
Je n'ai jamais été partisan de Jacques Chirac,
mais cette affaire à propos de billets d'avion payés en argent liquide m'étonne.
S'il les a payés, il ne les a pas volés, que je sache ; et payer en argent
liquide n'est pas un délit. Thierry Jean-Pierre a écrit dans un article du
"Monde" que l'argent liquide, c'était de l'argent sale. D'où lui
vient cette idée stupide qui, si on l'écoutait, anéantirait la fonction
fiduciaire de la monnaie ? L'argent est sale s'il a une origine illicite, non
s'il est liquide. Les quelques milliers de francs d'argent liquide que nous
retirons chaque mois de notre compte en banque pour payer les dépenses
courantes du ménage,
serait-ce de l'argent sale ?
Nous n'attendons pas d'un dirigeant qu'il soit un
ange, ni même qu'il ne fasse jamais d'erreur, mais qu'il dirige convenablement
l'entreprise, le ministère ou le pays qui lui sont confiés. C'est sur cette
fonction qu'il faut l'évaluer, et non sur de mesquines affaires d'intendance.
Les attaques contre Helmut Kohl, l'homme qui a réunifié
son pays, étaient déplacées, ainsi que
celles contre Lionel Jospin pour son passé de militant trotskiste.
On objectera qu'il faut savoir utiliser
tous les moyens pour coincer un criminel, aussi mesquins soient-ils, et que les Américains n'ont pu
condamner Al Capone que sur la fraude fiscale. Jacques Chirac aurait-il donc commis
des crimes, pour qu'on le "cherche" ainsi à propos de broutilles ? Si
la réponse est non, qu'on le laisse tranquille. Si la réponse est oui, ce serait
une affaire très grave, plus politique d'ailleurs que juridique. Et même envers le pire criminel on ne
doit pas
tout se permettre. Milosevic a été vendu au tribunal de La Haye pour quelques
millions de dollars : cela restera une tache pour le vendeur comme pour
l'acheteur.
Revenons à notre État de droit.
Les magistrats ne seraient-ils pas soumis, comme tout professionnel, à une
obligation de
discrétion ? J'ignore si, dans leur cas, cette obligation relève de la loi, du
règlement, de la circulaire ou de la déontologie, mais j'ai peu de
considération pour celui qui l'enfreint, comme pour le journaliste qui
claironne cette "information" sans la recouper.
Dans ce cas très visible, et
dans d'autres qui le sont moins, la présomption d'innocence est une fiction,
l'instruction se fait à charge, l'indiscrétion suscite l'applaudissement,
l'État de droit cède au culte du sensationnel, valeur unique des médias qui
constituent notre nouvelle aristocratie. Mais regardons l'histoire. L'assemblée (non
élue) des magistrats constituait sous l'ancien régime le
"Parlement". Ces magistrats ont fait leur possible pour arracher le
pouvoir au roi, et finalement la Révolution les a balayés de la scène
politique.
Les gens du PS ont estimé
"insuffisantes" les "explications" du Président de la
République alors qu'ils n'ont vu, je suppose, ni le dossier, ni les preuves.
Ils auraient mieux fait de se taire. Si c'est ainsi qu'ils préparent la
prochaine élection présidentielle, ils vont finir par nous faire voter Chirac.
Cette fiche a suscité des
réactions.
|