Aider les pays pauvres, c’est
une nécessité, à condition qu'on le fasse sans arrière-pensée géopolitique,
pétrolière ou autre et surtout sans condescendance. Mais pourquoi une taxe sur
les billets d’avion ? Le voyage aérien est taxé comme les autres produits, peut-être même plus que les autres : sur un vol Paris-Nice aller-retour à 94€,
52 € correspondent à des taxes et redevances (33 € payés par le passager, 19 €
par le transporteur).
Derrière cette proposition, on
entrevoit une idée démagogique : le transport aérien étant utilisé par les
riches, il est normal de le ponctionner pour aider les pauvres. Mais c’est
là une image désuète : il suffit de fréquenter les salles d’embarquement pour
voir que l’avion n’est pas utilisé que par des riches. Les travailleurs
immigrés qui prennent l’avion pour pouvoir visiter leurs familles ne font
évidemment pas partie des privilégiés de la fortune.
Sans doute les premières
classes seront-elles taxées plus lourdement, mais il reste que taxer le
transport aérien est étrange.
D’autres diront : l’avion émet
du CO2 ; le taxer est donc une bonne chose parce que comme cela
réduira la demande, cela diminuera d’autant le nombre des vols et les
émissions de gaz à effet de serre. Mais lutter contre le CO2 est une
chose, aider les pauvres en est une autre. Il ne faut pas tout mélanger et si
l’on voulait lutter contre les émissions de CO2, il y aurait bien d’autres
dispositions à prendre en priorité, par exemple envers l’automobile et le transport
routier.
Cette fausse bonne idée, fondée
sur une fausse évidence, fournit matière à des discussions et négociations
internationales. C'est toujours ça de gagné, sans doute, en termes d'image, de gesticulation,
de générosité affectée.
* *
A l’école primaire, nous avons
appris à nous gausser de la fiscalité de l’ancien régime, de l’écheveau de ses
taxes et en particulier de la gabelle qui pesait sur le sel. Aujourd’hui la TVA taxe
indifféremment toutes
les consommations (pas indifféremment en fait, puisque certaines
sont taxées à 5,5 %, d’autres à 19,6 % et d’autres, peut-être, à des taux que
j’ignore).
Plutôt que d’instaurer une
gabelle sur le transport aérien, il serait plus logique que les pays riches
rétrocèdent aux pays pauvres un point de la TVA qu’ils collectent sur la
consommation. Mais cela réduirait les ressources du budget alors que taxer le
transport aérien semble neutre pour les finances publiques.
Cela revient cependant, contrairement au
principe de la neutralité budgétaire, à assigner une destination précise à cette
taxe. Or on doit se défier des taxes destinées à financer la générosité
publique : la vignette automobile devait aider les vieux, puis elle est devenue
un impôt comme les autres avant qu’on ne la supprime finalement après avoir
compris (mais très lentement, car le calcul économique n'est pas le point fort
de la DGI) que sa collecte coûtait plus qu’elle ne rapportait. |