Ce
calcul date de 1996. Il est publié ici parce que le raisonnement garde sa
pertinence. Les données relatives à la demande, ainsi qu'aux prix et performance
des unités d'oeuvre, nécessitent par contre une mise à jour.
Lorsque l’on examine l’économie
de l’Internet, on aborde une question d’une grande complexité : les acteurs sont
multiples et de tailles différentes, leurs rôles respectifs ne sont pas
clairement définis, les règles de rétribution de chaque type d’acteur sont en
évolution, les ressorts sont multiples (les ressorts socioculturels n’étant
d’ailleurs pas des moindres) etc.
On s’aperçoit vite que la
dynamique économique de l’Internet résulte de l’interférence entre des
dynamiques jusqu’alors dissociées : l’économie des réseaux télécom longue
distance, l’économie des services, qui peut être une logique purement
commerciale pour la vente de biens en ligne, l’économie des réseaux d’accès (i.
e. la boucle locale).
Au départ de nos travaux se
trouvait une question simple mais essentielle. Parmi les diverses conditions de
pérennité de l’Internet, il est en une sine qua non : la viabilité
économique de l’Internet en tant que « réseau ».
En effet, il est important de se faire une idée de la sensibilité du coût du
réseau de l’Internet face à des scénarios d’évolution de son dimensionnement en
se plaçant dans un contexte marchand (i. e.. hors subventions). Le coût global
de l’infrastructure qui supporte les services, ramené à l’utilisateur de ces
services (qui sera toujours, directement ou indirectement, le payeur),
présente-t-il une évolution brutale et démesurément croissante, ou au contraire
présente-t-il une certaine stabilité, voire une décroissance dans le temps ?
Pour tenter de répondre à cette
question avec une certaine exactitude (et surtout autrement que par intuition)
nous avons appliqués les principes de modélisation technico-économique
similaires à ceux appliqués habituellement aux réseaux de télécommunication.
Cela suppose de raisonner sur une représentation simplifiée du réseau, tout en
conservant le minimum nécessaire de précision et de réalisme. Cela suppose aussi
de faire des choix raisonnés sur des hypothèses de travail.
Un calcul fondé sur des
hypothèses et sur un modèle n’est pas une prévision mais un outil de travail
permettant, à travers un chiffrage, de conduire le raisonnement à son terme.
C’est cet outil que nous proposons. Nous présenterons de façon explicite les
hypothèses que nous avons retenues, et celui qui entend les modifier sera libre
de le faire et d’en tirer les conclusions.
Partant du faisceau d’hypothèses
qui nous a paru le plus plausible, le résultat qualitatif principal auquel nous
sommes parvenu est la viabilité économique de l’Internet en tant que réseau.
Ce résultat est illustré par le graphique suivant : il montre que le prix que
l’utilisateur devra payer évolue à la baisse, alors même que nous prévoyons une
croissance de la consommation annuelle en octets par utilisateur.
Cette indication est bien sûr
conditionnée par les hypothèses que nous avons posées. Cependant, ces hypothèses
avaient été soigneusement choisies selon des critères de vraisemblance, et nous
avons multiplié les variantes pour vérifier la solidité de notre conclusion en
posant autrement les hypothèses dans l’intervalle des incertitudes. Enfin et
surtout, nous avons conduit ces calculs sans obéir à aucun préjugé favorable ni
défavorable.
La viabilité économique du
réseau est condition nécessaire pour que l’Internet perdure, mais non pas
condition suffisante : il faut en outre que l’équilibre des services offerts sur
l’Internet soit réalisé, et cet équilibre-là n’est pas considéré dans cette
étude. Une fois garantie la solidité économique de la plate-forme technique,
c’est sur cette deuxième condition qu’il convient de concentrer son attention.
Suite :
Introduction
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