Une de mes amies, ayant acheté
une résidence secondaire, a téléphoné à EDF et à France Telecom pour prendre des
abonnements.
Avec EDF, la conversation a
duré cinq minutes. Elle a dû indiquer son nom, son adresse et le numéro de son
RIB. On lui a demandé s’il s’agissait d’une résidence principale ou d’une
résidence secondaire, puis de décrire son équipement (« Avez-vous un
réfrigérateur ? Un congélateur ? Un four électrique ? Un four à micro-ondes ?
Quel type de lampe utilisez-vous ? »). L’interlocuteur savait déjà que
l’appartement était chauffé au gaz : une seule transaction a permis de souscrire
les abonnements au gaz et à l’électricité, même si EDF et GDF sont des
entreprises différentes. Le fait que l’adresse de facturation ne soit pas celle
du logement n’a posé aucun problème.
Avec France Télécom, la
conversation a duré plus d’une demi-heure. Elle a été souvent interrompue par la
phrase « vous patientez », suivie d’une petite musique irritante. On a demandé à
mon amie sa date et son lieu de naissance : elle a voulu savoir à quoi cela
servait, on lui a répondu « à remplir le formulaire ». Aucune question n'a été
posée sur l’équipement du logement, l’utilisation de la télécopie, de l’Internet
etc. Aucune suggestion concernant le raccordement ADSL ou le téléphone mobile
n’a été formulée. Noter une adresse de facturation différente de celle du
logement a paru difficile et a pris du temps. Par la suite, et alors que mon
amie avait demandé le prélèvement automatique et indiqué son RIB, elle a dû
envoyer un chèque pour payer la première facture. Réponse du centre d'appel à
ses questions : « Oui, nous avons bien votre RIB, mais cela prend du temps ; le
prélèvement automatique ne sera en place que pour la deuxième facture. »
D’un côté, un service souple,
complet, rapide, fédérant l’offre de deux entreprises, fourni par une personne
qui connaît son métier et dispose d’un système d’information performant. De
l’autre, un service lent, maladroit, réduit au seul téléphone fixe, fourni par
quelqu’un qui n’a pas été bien formé et que le système d’information outille
mal.
* *
Nous avons besoin, nous
autres consommateurs, d’un opérateur capable de répondre simultanément
à tous nos besoins – qu’il s’agisse de téléphonie fixe ou mobile, de
télécopie, de messagerie écrite ou vocale, d’accès à l’Internet à haut ou bas
débit, d'audiovisuel et de musique, de réseau local WiFi ou autre, et que ce soit dans notre résidence
principale, notre résidence secondaire ou notre bureau. Nous avons besoin
aussi que l’on résolve, ou nous aide à résoudre, les problèmes de
paramétrage et de dépannage que pose une installation devenue quelque peu
complexe et intégrée.
J’ignore ce qui s’y oppose.
Est-ce l’ART qui, sous prétexte d’encourager la concurrence, empêche l’opérateur
de fournir au consommateur le service global dont celui-ci a pourtant besoin ?
Est-ce un raisonnement erroné qui, sous prétexte de réduire le coût
d'exploitation, incite
l'opérateur à négliger la qualité du service rendu au client ?
Certains disent que des
dispositions juridiques lui interdisent de fédérer ses diverses offres. Mais
alors, comment EDF et GDF ont-elles pu fédérer les leurs ? L’obstacle ne résiderait-il pas plutôt dans une organisation en féodalités qui s’ignorent
ou rivalisent ? Ou encore dans une culture d’entreprise qui se focalise sur le réseau
et non sur les services que l'on peut rendre sur celui-ci ?
Ou bien l'obstacle se
trouve-t-il chez nous, consommateurs ? Notre satisfaction est fonction du
rapport qualité / prix des produits que nous consommons. Mais l'évaluation de la
qualité est subtile, alors que l'affichage du prix est évident. C'est pourquoi
nous nous précipitons vers les offres au plus bas prix, quitte à être ensuite déçus. Nous ne savons pas formuler nos besoins en termes de qualité,
alors qu'il nous est facile de réclamer encore et encore des baisses de prix.
Si l'obstacle est celui-là, nous
ne pourrons recevoir un service de qualité que lorsque nous saurons le demander.
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