Comment sortir de la crise ?
Lorsqu'une entreprise est en crise, cela se manifeste à travers des incidents répétés, et aussi (et de façon plus visible
encore) à travers le langage utilisé dans l'entreprise.
Peut-on soigner le mal en corrigeant le langage ? Non, car il n'est qu'un
symptôme. Si l'on restaure le processus de décision, le langage suivra. Cependant le
langage des dirigeants conditionne le processus de décision : c'est à eux en effet qu'il
revient de "donner du sens" à l'entreprise. Il sagit non d'apporter
un "supplément dâme", expression un peu méprisante (comme quand on dit
de celui qui signale une difficulté qu'il a des "états d'âme" ), mais de
structurer larchitecture de lentreprise : processus de production et
de gestion, outils de connaissance et dinterprétation, élaboration de la
stratégie.
Or pour une entreprise, comme pour un bâtiment, l'architecture a deux aspects :
ce qui a été construit s'impose par son évidence et sa pérennité apparente ; ce qui
se conçoit, puis se construit, relève de l'imagination et de la volonté. Ceux qui
manquent d'imagination ne voient que l'existant (ils appellent cela du
"pragmatisme") et ignorent le possible. L'histoire, en montrant les origines de
l'existant, permettrait de percevoir la dynamique de sa conception ; mais l'expérience
montre que les conformistes sont imperméables à ses enseignements.
Mieux vaut donc, en utilisant une démarche analogue à celle de l'école de Palo Alto, progresser par petits changements pour
faire comprendre ("réaliser", selon un anglicisme ici opportun) puis accepter
de nouvelles perspectives. Il ne s'agit alors que de débloquer les conditions
pratiques élémentaires du processus de décision :
- tableaux de bord sélectifs et clairs pour les dirigeants ;
comités équilibrés : lexpertise technique sexprime, la
légitimité politique décide ;
qualité sémantique du système dinformation (administration des
données) ;
équilibre des responsabilités et pouvoirs entre maîtrise d'ouvrage et
maîtrise d'oeuvre du système d'information ;
etc.
Nous ne détaillerons pas ces conditions : nous voulions seulement montrer que l'examen
du langage contribue au diagnostic de crise.
Si l'entreprise fonctionne comme un organisme sain, son
langage est sans enflure ; les gens ne parlent plus de "sérieux", de
"méthodologie" ni de "qualité" ; ils disent : "la boîte marche
bien", "cest simple", "on sait ce quon a à faire",
"on est bien outillés", "on est bien dirigés", "c'est
efficace", "ça tourne", "c'est organisé". Cette clarté, cette
simplicité sont le meilleur actif de l'entreprise. Il se construit progressivement, puis
s'entretient, par un processus de décision fin et vigilant.
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