La richesse des Nations (2007)
13 septembre 2007
Cette fiche est une mise à jour de La richesse des Nations (2005), à laquelle on la comparera utilement.
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L’INED a publié « Tous les pays du monde 2007[1] », qui fournit pour chacun des 204 pays les données démographiques disponibles ainsi que l’estimation du PNB 2005[2] par habitant. Le PNB par habitant, mesuré ici en $ US p.p.a. (« en parité du pouvoir d’achat »), évalue la richesse moyenne de la population du pays considéré. Nous l'appellerons « richesse » tout court.
Certes, cet indicateur prête à
discussion :
- comme les pondérations utilisées pour le mesurer reflètent la structure de la
consommation dans les pays les plus riches, le PNB sous-évalue sans doute la richesse des autres pays[3] ;
- le poids économique d’un pays doit être évalué non selon la richesse par
tête, mais selon la richesse totale (produit de la richesse par tête par la
taille de la population) ;
- la richesse par tête est une information insuffisante si on ne la complète pas par
la mesure des inégalités ;
- cet indicateur reflète une situation instantanée qu’il n'explique pas plus qu'il ne permet d'anticiper l'évolution future ;
- pour 43 pays, le PNB par habitant n'est pas indiqué : la comparaison ne peut
donc porter que sur les 161 pays restants. Ils représentent toutefois 97 % de la
population mondiale.
Il convient donc de prendre cet indicateur pour ce qu’il est : une photographie imparfaite, incomplète, qui demande à être interprétée. Nous allons cependant tâcher de le faire parler.
Considérons d’abord la courbe cumulative de la richesse en mettant en abscisse la population cumulée, en ordonnée la richesse cumulée (les pays sont empilés dans l’ordre de la richesse décroissante). Cette courbe donne une vue synthétique de la répartition de la richesse mondiale entre pays.
A eux seuls les Etats-Unis, qui représentent 5 % de la population, produisent 21 % de la richesse mondiale. La moitié de la richesse est produite par des pays qui représentent 14 % de la population. Les pays les plus pauvres, 20 % de la population, se partagent 4 % de la richesse.
Pour recouper richesse et démographie, il faut se fixer un seuil de taille : certains pays, concentrés autour d’une ressource spécifique (minière, géographique ou institutionnelle), constituent des exceptions : si la région Île-de-France était un pays, ce pays serait l’un des plus riches. Le Luxembourgeois, dont le pays s'est spécialisé dans la finance, a le revenu le plus élevé du monde[4].
La mesure de la richesse sera plus significative si on considère une population de grande taille. En fixant le seuil à 20 millions d’habitants on conserve 55 parmi les 204 pays du monde, et 89 % de la population mondiale[5].
Pour cinq de ces derniers pays la mesure du PNB n’est pas disponible : Myanmar (Birmanie), Afghanistan, Irak, Corée du Nord et Taïwan. Il reste finalement 47 pays représentant 87 % de la population mondiale. Nous allons examiner sur cet ensemble quelques corrélations significatives.
Regardons d'abord comment a évolué dans cet ensemble le classement des pays les plus riches. J’ai consulté pour cela cinq éditions de « Tous les pays du monde », et obtenu le graphique suivant en retenant les neuf pays les plus riches (le dixième pays dans l'ordre du classement, la Corée du Sud, est nettement moins riche que le neuvième : alors que le PNB par habitant est en 2005 égal à 25 820 $ pour l'Espagne, il est égal à 21 850 $ pour la Corée du Sud).
La France (30 540 $) figure parmi les neuf pays ayant plus de 20 millions d'habitants les plus riches. Cela ne signifie pas qu’il n’existe pas de misère en France, mais cela concerne la distribution de la richesse et non pas son niveau moyen.
La France était classée quatrième en 1994 (après les Etats-Unis, le Japon et le Canada), sixième en 1999 (elle a été doublée par l’Australie et l’Allemagne), huitième en 2001 (elle a été doublée par le Royaume-Uni et l’Italie), et de nouveau sixième en 2003 et 2005 (elle a doublé l'Allemagne et l'Italie). Toutefois ces fluctuations du classement n'ont pas une grande signification : en fait le classement de ces neuf pays comporte un leader qui mène la course en tête (les Etats-Unis, 41 950 $), un traînard qui reste en queue (l'Espagne, 25 820 $) et, au milieu, un peloton serré à l'intérieur duquel les écarts sont relativement petits.
Par ailleurs une population qui comprend beaucoup de jeunes ou de vieux sera, à productivité égale, moins riche qu’une population qui a peu d’enfants ou une durée de vie courte. Il faut pour comparer les productivités considérer plutôt le PNB par personne d’âge actif. On obtient le résultat suivant en ne considérant que la population dont l'âge se situe entre 15 et 65 ans :
La France était selon ce critère classée sixième en 1994, quatrième en 1999, sixième en 2001 et cinquième en 2003 et 2005. Mais le graphique fait apparaître que le peloton est encore plus resserré quand on ne considère que la population d'âge actif. Au total, et si l'on en croit la mesure du PNB, on ne perçoit pas de déclin de la France...
Les évaluations ci-dessus sont en dollar courant. Pour percevoir l'évolution du pouvoir d'achat, il faut tout ramener aux prix de 2003 (d'après le Bureau of Labor http://data.bls.gov/cgi-bin/cpicalc.pl, un dollar de 1994 vaut 1,32 $ de 2005 etc.). L'évolution des PNB en volume a alors l'allure suivante :
[1] Gilles Pison, « Tous les pays du monde (2007) », Population & sociétés, n° 436, juillet-août 2007, http://www.ined.fr/fichier/t_publication/1318/publi_pdf1_436.pdf. Par "pays", on désigne ici des entités géographiques distinctes et non des nations au sens du droit : la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion etc. sont considérées comme des pays.
[2] « Produit National Brut », évaluation du revenu d'un pays durant une année. Le PNB est la somme du PIB (Produit Intérieur Brut), qui mesure la valeur de la production d'un pays, et des revenus nets (dividendes, loyers etc.) qui lui viennent d'autres pays.
[3] Etienne Ntitebirageza, statisticien burundais, m’a dit ainsi que le PNB par tête de son pays (640 $) ne représentait pas son niveau de vie : il prend mal en compte les jardins familiaux, ressource importante pour l’alimentation des Burundais.
[4] Au Luxembourg, pays qui compte 470 000 habitants, le secteur financier emploie 52 000 personnes et génère 38 % du PNB (Denis Robert, La boîte noire, Les Arènes 2002, p. 93). Le PNB par tête du Luxembourg est de 65 340 $, alors que celui des Etats-Unis est de 41 950 $. Il est vrai toutefois que de nombreux Français, Allemands, Belges etc. passent chaque jour la frontière pour travailler au Luxembourg.
[5] La population mondiale est évaluée à la mi-2007 à 6 625 millions de personnes.
Pour lire un peu plus :
- La
France est-elle en déclin ?
-
Relation entre richesse
et démographie
- La richesse
des Nations (2003)
-
La richesse des Nations
(2005)
- Un outil utile :
Gapminder
www.volle.com/statistiques/monde2007.htm
© Michel VOLLE, 2007
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