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Les TIC[1], enjeu de l’entreprise contemporaine

11 novembre 2007

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Pour lire un peu plus :

-
Histoire des Techniques
- L’avenir du Capitalisme
- The Utility of Force
- De l’Informatique : savoir vivre avec l’automate
-
Structure and Interpretation of Computer Programs
-
The Art of Computer Programming
-
Producing Open Source Software
- Prédation et prédateurs
- Rapacités
- Noir Silence
- La boîte noire

Le texte ci-dessous est un article destiné à la revue La Pensée.

*     *

Résumé

Pour l’entreprise, l’ordinateur n’est pas une machine de plus, les TIC ne se réduisent pas à une collection de gadgets : après 1975 l’informatisation a fait émerger l’entreprise contemporaine qui met en scène l’alliage de l’organisation et de l’automate en réseau. La nature des produits, la structure de l’emploi et des qualifications, la forme de la concurrence en sont transformées. Cette évolution, qui est loin d’être achevée, nous confronte à des possibilités et des menaces qu’il faut percevoir clairement.

The computer is not just another machine; IT is not just a collection of gadgets. After 1975 the contemporary firm resulted from the computerization, putting in action an alloy between its organization and the networked automaton. Products, employment and qualifications – as well as the mechanisms of competition – have been modified. This evolution, far from being accomplished, confronts us with opportunities and dangers which we have to perceive clearly.

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D’un système technique à l’autre

Qu’il y ait eu une cassure en 1975, beaucoup d’observateurs le confirment. Selon Nicolas Baverez cette année-là sépare les « trente glorieuses » des « trente piteuses[2] ». Mais quelle est la nature de cette cassure ?

Pour l’interpréter prenons pour outil le modèle des « systèmes techniques » qu’a proposé Bertrand Gille[3] : chaque époque de l’histoire est caractérisée par une synergie entre quelques techniques fondamentales. Dans les temps modernes l’entreprise industrielle naît au XVIIIe siècle de la synergie entre la mécanique et la chimie ; s’y ajoute vers la fin du XIXe siècle l’électricité, et cela donne naissance à l’entreprise moderne. En 1975 enfin naît l’entreprise contemporaine qui exploite la synergie toute nouvelle entre la microélectronique et le logiciel.

Chaque système technique suscite progressivement une structure institutionnelle qui lui est adaptée. Lorsque le potentiel que procure la synergie s’épuise, cette structure résiste de toute la force de son inertie à l’émergence du système technique suivant : il est en effet dans la nature des choses qu’une institution, créée au départ pour remplir une mission, s’organise puis se fossilise, la mission étant perdue de vue au bénéfice de la reproduction de l’organisation à l’identique.

C’est pourquoi l’invention, qui rend de nouvelles techniques possibles, ne suffit pas pour faire naître un nouveau système technique. Il faut aussi qu’une catastrophe inaugurale ait liquidé les institutions existantes, ou les ait tout au moins suffisamment affaiblies pour que leur résistance ne puisse pas bloquer la mise en œuvre des possibilités nouvelles.

Si l’industrie naît avec la Grande-Bretagne vers 1707, c’est à la suite de la longue révolution qui, pendant les XVIe et XVIIe siècles, avait bouleversé l’Angleterre en mettant à bas la cléricature catholique et en exterminant l’aristocratie pour aboutir enfin à la Glorious Revolution de 1688. Alors il est devenu possible, dans ce pays et celui-là seul, d’exploiter à fond les possibilités qu’avaient ouvertes la redécouverte de la pensée rationnelle à la Renaissance, puis l’invention de la démarche expérimentale par Galilée.

Graphique 1 : dynamique d’un système technique

Quand un nouveau système technique s’épanouit dans le pays qui, le premier, a su exploiter une synergie féconde, il lui confère de tels avantages commerciaux et stratégiques qu’il est inévitablement imité par d’autres pays ; mais dans ces pays-là sa rencontre avec les institutions en place provoque des catastrophes conséquentes – c’est une des clés de la révolution française[4].

L’entreprise moderne, elle, naît dans le loop de Chicago après l’incendie du 8 octobre 1871 (catastrophe inaugurale). Elle s’épanouira à partir de 1895 avec la deuxième révolution industrielle, celle de l’électricité. Chicago a été le premier en date des centres d’affaires modernes : grâce aux chemins de fer, et surtout après l’invention du wagon frigorifique en 1877, il est devenu le pivot du négoce mondial des produits agricoles et de la viande. Autour de ce négoce se sont créés en quelques années des banques, des assurances, une bourse, des services administratifs, une université, des industries, bref toutes les activités propres à la très grande ville y compris la délinquance. L’organisation méthodique du travail de bureau s’y concrétisa dès 1884 par l’édification du premier gratte-ciel. 

*     *

Bien avant 1975, des inventions avaient préparé des techniques qui étaient prêtes à former une nouvelle synergie : le premier langage de programmation (Fortran) date de 1954, le circuit intégré de 1958, Arpanet (précurseur de l’Internet) de 1969, le microprocesseur de 1971, Ethernet de 1973, le micro-ordinateur enfin de 1974.

Mais il fallait une catastrophe inaugurale pour que ces inventions, donnant naissance à des innovations, fussent mises en œuvre : la catalyse a été déclenchée par l’embargo sur le pétrole décidé par l’OPEP le 17 octobre 1973, pendant la guerre du Kippour. Les entreprises virent alors dans l’informatique une planche de salut[5].

Graphique 2 : évolution de la structure de la population active

Le choc a été violent. L’emploi dans l’industrie et le BTP[6], dont la part dans la population active avait crû de façon pratiquement continue depuis le début du XIXe siècle, atteint en 1975 son maximum à 39 % ; puis il entame une décroissance qui ne sera pas même ralentie par le « contre-choc pétrolier » de 1986. La cassure tendancielle qu’on lit sur le graphique ci-dessus est révélatrice : en 1975, l’économie française a changé de nature, tout comme d’ailleurs les économies des autres pays riches. En 2006, alors que le secteur tertiaire emploie 74,5 % de la population active[7], l’industrie et le BTP n’en emploient plus que 21,3 %.

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L’esquisse ci-dessus est sommaire. Nous avons fait l’impasse sur nombre de points importants comme, par exemple, le rôle du moteur dans la géographie et l’organisation de l’entreprise industrielle, ou encore l’influence de l’industrie dans le domaine de l’armement etc. : nous ne pouvons que renvoyer le lecteur à des travaux approfondis[8] et le prier d’accepter, au moins comme une hypothèse dont il explorera avec nous les conséquences, le schéma que nous proposons. Résumons le :

(A) l’histoire économique se découpe en épisodes caractérisés chacun par le déploiement d’une synergie entre quelques techniques fondamentales et cette synergie constitue un système technique ;

(B) chaque système technique met en place progressivement les institutions nécessaires à son fonctionnement ;

(C) ces institutions, donnant la priorité à la reproduction à l’identique de leur organisation, perdent leur mission de vue ;

(D) le passage d’un système technique à l’autre suppose (1) des inventions, qui rendent possible la mise en exploitation de ressources naturelles nouvelles ; (2) une catastrophe inaugurale qui liquide ou affaiblit les institutions en place ; (3) des innovations concrétisant le potentiel que comportaient les inventions ;

(E) le nouveau système technique naît d’abord dans un pays pionnier, lui conférant un avantage économique et stratégique. Les autres pays l’imiteront, ce qui déstabilisera leurs institutions et provoquera des catastrophes conséquentes

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Pendant un siècle et demi la puissance des nations s’est mesurée selon leur degré d’industrialisation. Le pays pionnier était la Grande-Bretagne, qui s’était ainsi hissée au premier rang et que les autres pays imitaient de leur mieux.

Aujourd’hui, la puissance des nations se mesure selon leur degré d’informatisation. Les Etats-Unis sont le pays pionnier. Les autres pays trottinent derrière eux, subissant des catastrophes conséquentes.

Quels sont les facteurs qui catalysent une nouvelle synergie, et pourquoi dans un pays plutôt qu’un autre ? Pour expliquer l’avance prise par l’Angleterre, puis par les Etats-Unis, on peut évoquer avec Max Weber l’éthique protestante[9] ou, avec Gramsci, l’hégémonie de l’entreprise parmi les institutions américaines[10] ; le lieu où se produit la catastrophe initiale est lui aussi déterminant.

Lorsqu’une nouvelle synergie se déploie elle est aussi indifférente aux priorités et valeurs humaines que ne peut l’être un phénomène naturel. L’informatique n’est ainsi ni meilleure, ni pire, que ne l’a été l’industrie : comme celle-ci le fit naguère, elle se plie aux désirs de ceux qui la mettent en œuvre et présente donc, liés ensemble comme un bouquet, autant de dangers que de possibilités.

De ce point de vue rien ne semble plus nécessaire, aujourd’hui, que de prendre la mesure, de comprendre la nature du phénomène de l’informatisation[11] et en tout premier des transformations qu’il provoque dans son lieu privilégié : l’entreprise.  

Alliage de l’APU et de l’EHO

Le mot « ordinateur » et l’anglais « computer », tout comme l’adjectif « numérique », sont des termes malencontreux car leurs connotations orientent l’intuition vers de fausses pistes.

L’ordinateur ne crée pas de l’ordre : si vous n’y veillez pas vous-même, un désordre inouï s’installe dans votre répertoire et sur votre disque dur. On n’utilise pas l’ordinateur seulement ni principalement pour des calculs, des computations : ni le traitement de texte, ni la messagerie ne relèvent du calcul et s’il est vrai qu’ils se concrétisent sous forme de 0 et de 1 dans les mémoires et processeurs ils ne sont pas plus numériques que ne le sont les couleurs pour un peintre, lequel ne raisonne pas sur des longueurs d’onde. 

L’expression qui rend compte de l’ordinateur, c’est automate programmable ; et comme il ne se sépare plus aujourd’hui du réseau, nous dirons automate programmable doué d’ubiquité, APU[12].

Le canard digérateur de Vaucanson était un automate mais il n’était pas programmable ; le métier à tisser de Jacquard obéissait à un programme mais ne pouvait rien faire d’autre que du tissage. L’ordinateur est un automate essentiellement programmable, fait pour exécuter tout ce qu’il est possible de programmer : traitement de texte, musique, vidéo, pilotage automatique d’un avion, commande des robots etc. Il a fallu un étonnant effort d’abstraction pour concevoir l’automate à tout faire, sans finalité déterminée mais bâti pour commander des périphériques spécialisés (écran, imprimante, hauts parleurs, ailerons d’un avion etc.).

L’ordinateur qui se trouve sur notre bureau est relié, via le réseau local ou l’Internet, à des ressources de puissance et de mémoire, des serveurs dont la localisation nous est indifférente : il nous donne ainsi accès à un espace logique[13], sémantique, où résident des documents (textes, images, sons) et où la distance s’exprime non plus selon la géographie mais selon l’intelligibilité ou (ce qui revient au même) l’intérêt d’un texte pour un lecteur.

L’ensemble que forment notre ordinateur, le réseau et les serveurs constitue un seul automate, un seul APU car nous ne faisons pas de différence, lorsque nous utilisons l’écran-clavier, entre les ressources qui résident sur notre disque dur et celles qui résident sur un serveur.

Devant l’APU, on ne fait jamais que trois choses : lire, écrire, lancer des traitements ; mais s’il est tout simple d’évoquer ces trois actions leur contenu se décline selon une infinie diversité. Dans l’entreprise, l’APU assiste le travail des agents opérationnels, des cadres et des dirigeants en leur donnant accès à l’espace logique et à des outils de traitement.

Entre l’APU et l’être humain s’établissent ainsi une coopération, une synergie, et pour qu’elles soient fécondes les tâches doivent se partager selon les aptitudes de chacun des deux partenaires. L’APU est infatigable dans l’exécution des tâches répétitives, il sait classer et retrouver des documents, il calcule très vite. L’être humain, pour sa part, sait comprendre, expliquer, décider. Chacun des deux est maladroit dans ce que l’autre sait bien faire.  

Précisons que l’être humain qui agit dans l’entreprise n’est pas l’être humain entier, l’individu ineffable que chacun porte en lui : c’est l’être humain inséré dans une organisation et qui met sa compétence au service de la production, l’« être humain organisé », EHO. On peut certes estimer que c’est là une conception limitée, mutilée de l’être humain ;  mais il est sans doute préférable que l’entreprise ne se soucie pas de l’intimité de ses salariés, de leurs orientations personnelles. Le fait est qu’elle ne considère que leur compétence professionnelle.

L’entreprise contemporaine se construit autour de l’alliage « EHO - APU » tout comme l’entreprise industrielle s’était construite autour de l’alliage « homme – machine ». Alors que la machine avait pour fonction de soulager l’effort physique, l’APU assiste l’effort mental que demande la production. L’APU n’est donc pas simplement une machine de plus, son intervention dans l’entreprise est d’une autre nature que celle de la machine. Il s’allie à une autre couche de l’être humain, plus intime et plus délicate sans doute que ne le sont sa musculature et son squelette.

Intellectualisation de l’entreprise

L’informatisation a suscité une extraordinaire intellectualisation de l’entreprise. Tous les êtres que l’action de celle-ci implique (produits, clients, fournisseurs, partenaires, méthodes, processus etc.) sont en effet dotés d’une doublure informationnelle qui les représente dans le système d’information (SI) et que l’EHO peut construire, consulter, enrichir, modifier, commenter, faire circuler, partager et soumettre à des traitements automatiques. Les processus de production sont ainsi précédés, accompagnés et suivis par une opération documentaire qui les prépare, les assiste et les contrôle.


Le système d’information (SI)

L’expression « système d’information » désigne la structure et le fonctionnement de la doublure informationnelle de l’entreprise.
L’organisation d’un SI articule :
- la DSI, maître d’œuvre de la plate-forme informatique et télécoms (mémoires, processeurs, réseaux, systèmes d’exploitation, logiciels) qui rassemble les ressources physiques du SI ;
- les maîtrises d’ouvrage qui, dans chacun des « métiers » de l’entreprise, sont responsables de la définition sémantique et logique (urbanisation, modélisation, spécifications) qui guide la réalisation des logiciels dits « applicatifs ».

 

Pour mettre au point un SI, il faut sélectionner les êtres qu'il va identifier puis choisir, dans la diversité de leurs attributs, ceux qu’il retiendra et la façon dont il les enregistrera (codages et nomenclatures). Cela suppose une pratique de l’abstraction.

Mettre l’abstraction en œuvre au service de l’action fait émerger, dans la pensée, une démarche sans doute habituelle dans la vie courante mais que l’intellect a du mal à assimiler. Alors que la pensée mathématique, sur laquelle s’appuie la philosophie héritée des Grecs, est fondée sur des définitions et répond donc à la question « qu’est-ce que c’est » (what is), l’informatique répond en effet à la question « comment faire » (how to) qui indique à la pensée de tout autres priorités[14]. L’algorithmique est par ailleurs un art d’autant plus complexe qu’il doit jouer avec les limites de l’APU, notamment avec la dimension finie de sa mémoire[15].

Orienté vers l’action, le SI accorde plus d’importance au processus qu’aux concepts – plus précisément il met les concepts en scène au sein du processus de production dans lequel ils évoluent. L’« objet » informatique (en fait, le dossier) qui représente un client, un agent, un produit etc. se transforme ainsi pour enregistrer les événements survenus dans sa relation avec l’entreprise : il a un « cycle de vie ».

Articuler ainsi le même et la différence, maintenir l’identité d’un être qui évolue, c’est une expérience que chacun fait dans sa propre vie puisque nous ne cessons d’évoluer de la naissance à la mort. Cependant notre pensée, suivant le chemin inauguré par Parménide  et Platon, place plus volontiers l’Être dans des concepts qui, comme ceux du cercle ou du triangle, ne comportent aucun changement. Il en résulte qu’elle peine à se représenter l’évolution et la transformation. La dynamique du SI, le traitement des questions de synchronisme, parallélisme, concurrence, persistance etc. posent des problèmes parmi les plus délicats[16].

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Intellectualisation de l’entreprise, doublure informationnelle, pratique de l’abstraction, approche du réel par les processus plutôt que par les concepts : ces nouveautés se heurtent, dans l’entreprise, au réalisme trivial du « business is business », aux exigences sommaires de la « bottom line » et du profit à court terme, à l’avidité des actionnaires et des dirigeants, aux soucis de carrière des cadres etc.

Dans les DSI[17], dans les SSII[18], auprès des maîtrises d’ouvrage, des agents au statut modeste ou moyen accomplissent un travail intellectuel que la plupart des entreprises ne comprennent pas et qu’elles ne savent pas évaluer. Ils rencontrent des blocages psychologiques, sociologiques, parfois philosophiques et ces derniers sont les plus difficiles à surmonter. Les particularismes des directions et établissements s’opposent à la bonne tenue des référentiels ; le goût du secret et le petit pouvoir que confère le monopole d’une information s’opposent à la production d’indicateurs ; la crainte du contrôle s’oppose à la mise en place de workflows[19] ; la séparation que l’on croit devoir établir entre la pensée et l’action, entre l’intellect et l’entreprise, s’oppose à la pratique de l’abstraction[20].

Il s’en faut donc de beaucoup que l’informatisation soit comprise et bienvenue. Mais elle est à l’œuvre, irrésistiblement ; elle pousse les entreprises et les fait avancer, même si c’est à reculons, maladroitement, lentement, en trébuchant sur le moindre obstacle.

Et si cette évolution interne ne suffit pas, l’entreprise évoluera encore par le mécanisme des décès et naissances qui renouvellent continuellement sa démographie.

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L’entreprise est une institution, une organisation formée en vue d’une mission, et toute institution peut être considérée comme une entreprise si l’on assimile sa mission à un produit. C’est notamment le cas des grands systèmes institutionnels (parlementaire, judiciaire, sanitaire, éducatif etc.) dont se sont dotés les pays industrialisés et qui se sont, non sans luttes et tâtonnements, adaptés aux besoins de l’économie industrielle.

Mais contrairement à l’entreprise ces systèmes institutionnels jouissent d’une pérennité au moins apparente qui s’oppose à leur renouvellement. Imitant l’Église qui en Europe a servi de modèle à toutes les institutions, ils ont sacralisé leurs procédures ainsi que la hiérarchie[21] des pouvoirs légitimes de décision et d’arbitrage. Selon la pente fatale à toute institution, certains d’entre eux ont perdu leur mission de vue au bénéfice de corporations auxquelles ils servent de forteresse.

Plus encore que l’entreprise, les grands systèmes institutionnels résistent donc à l’informatisation de toute la force de leur inertie. Ils ont milité pour détruire l’informatique, l’expulser comme un corps étranger et dangereux, et ils ne sont pas pour rien dans l’échec des tentatives européennes et françaises : Plan Calcul (1966-1975), Plan « informatique pour tous » (1985).  

La poussée de l’informatisation fera craquer les forteresses et brisera les systèmes institutionnels qui lui résistent, provoquant ainsi de ces catastrophes conséquentes qui se produisent toujours lorsqu’un pays imite une synergie qui s’est d’abord déployée ailleurs (ici, aux Etats-Unis) mais dont il n’a assimilé ni les ressorts, ni la logique, et dont il se refuse à accepter les conséquences.

L’automatisation et ses effets

L’informatique a permis d’automatiser la production des biens : c’est ce qui explique la baisse rapide de l’emploi industriel depuis 1975. La structure de l’emploi s’est transformée. L’usine automatisée emploie peu d’ouvriers si ce n’est pour l’entretien et l’emballage des produits, tâches qu’il est difficile d’automatiser. Les usines ne sont plus ses établissements les plus importants et d’ailleurs la production physique est éventuellement sous-traitée.

Lorsque la production est automatisée le coût marginal de production n’est rien d’autre que le coût de fonctionnement de l’automate, qui est faible. L’essentiel du coût de production se trouve alors dans l’étape antérieure à la production physique, dans la conception du produit et la programmation de l’automate. C’est évident dans le cas des deux produits qui fondent la synergie fondamentale du système technique contemporain, les circuits intégrés et les logiciels : le coût marginal d’une puce est négligeable, ainsi que le coût marginal du CD sur lequel est gravé un système d’exploitation ; par contre leur coût de conception est très élevé (de l’ordre de 10 milliards de dollars pour un microprocesseur).

Depuis les technologies fondamentales du circuit intégré et du logiciel cette forme de la fonction de coût se répand vers les produits qui les utilisent : ordinateurs, commutateurs et routeurs d’abord, mais aussi automobiles, avions etc. Tendanciellement, la part du coût de conception dans le coût total de production des biens s’est accrue. Le coût marginal est devenu faible, parfois négligeable.

L’expression « économie de l’information » que l’on utilise parfois pour désigner l’économie contemporaine reflète maladroitement ce phénomène – car s’il est vrai que les travaux de conception se concrétisent par des plans, programmes, organisations etc. et sont donc constitués d’information, « économie de la conception » aurait été plus exact.

Comme le coût du transport est lui aussi devenu faible ou négligeable, et que l’entreprise sera d’autant plus profitable qu’elle pourra écouler le plus grand volume de son produit, elle va chercher à desservir le marché le plus large possible : elle s’orientera vers le marché mondial, qui tend à former une seule économie. Dans l’économie contemporaine, la mondialisation est ainsi endogène.  

En raison de la baisse du coût marginal, la production se fait à rendement d’échelle croissant : le coût moyen de production diminue lorsque le volume produit augmente. Il aurait pu en résulter, dans tous les secteurs qui sont touchés, une situation de monopole naturel : la plus grosse entreprise serait en mesure d’évincer ses concurrents, car produisant un plus gros volume elle pourrait vendre à un prix plus bas que le leur. Les autres entreprises n’ont donc pu survivre qu’en pratiquant une diversification du produit en variétés correspondant chacune aux préférences d’un segment de clientèle et en se taillant de petits monopoles locaux dans l’espace des besoins.

L’offre de chaque produit s’est ainsi éparpillée en une multitude de variétés, de structures tarifaires etc. entre lesquelles il est devenu difficile pour un consommateur de trouver ce qui lui convient le mieux. L’offre a donc dû être accompagnée de services qui aident le consommateur : intermédiation et avant-vente pour le choix du produit, installation éventuelle, assistance et formation, maintenance et entretien périodique, assurances, crédit à la consommation etc.

Le produit s’est ainsi enrichi d’une offre de services : il est devenu un assemblage (package) de biens et de services[22] muni de sa propre doublure informationnelle. Le client qui achète une automobile, produit physique s’il en est, achète en même temps le conseil que donne un vendeur pour sélectionner le modèle, le service financier du crédit, les alertes que le constructeur émettra si un défaut se révèle, une garantie « pièces et main d’œuvre » pour les réparations, un entretien périodique, une assurance etc. Le concessionnaire dispose, dans son atelier, de programmes informatiques qui lui permettent de tester et entretenir le véhicule.

Lorsque le coût réside dans la conception, le risque est élevé : l’essentiel du coût de production est dépensé avant que l’entreprise n’ait mis une seule unité du produit sur le marché, qu’elle n’ait reçu la première réponse des clients, qu’elle n’ait pu connaître l’offre de ses concurrents. Le risque est d’autant plus grand que la différenciation qualitative se fait non seulement de façon horizontale, à coût de production équivalent (couleur d’une automobile, d’une chemise etc.) mais aussi de façon verticale : la pression de la concurrence incite à accroître le rapport qualité / prix et pousse le coût de production vers le haut.

L’entreprise contemporaine est donc dans une situation de risque maximum et, pour le réduire, elle va le partager avec d’autres entreprises. La plupart des produits seront élaborés par des partenariats ; une ingénierie d’affaire établit les contrats qui précisent les responsabilités des partenaires, ainsi que le partage des dépenses et des recettes. Les processus de production traversant les frontières des entreprises, les SI devront être interopérables, le partage des données relatives aux coûts et recettes devra être transparent.

Ainsi, à l’alliage « EHO – APU » répondent, dans le produit, un alliage « biens – services », et dans la production un alliage « partenaire – partenaire ». Une doublure informationnelle, le SI, assure la cohésion de chacun de ces alliages ainsi que leur articulation mutuelle.

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Le passage du système technique mécanisé au système technique informatisé s’est accompagné d’une transformation de la structure de l’emploi (cf. graphique 2). Dans l’entreprise contemporaine elle tend vers une forme spécifique (les pourcentages ci-dessous indiquent l’ordre de grandeur de chaque catégorie ; ils varient d’une entreprise à l’autre) :


Structure de l’emploi

– la direction générale (stratégie, gestion des ressources humaines, finance, SI) est située dans le quartier d’affaire d’une grande ville (10 %) ;

– la conception des produits se fait dans un bassin de compétence où les concepteurs trouvent un contexte intellectuel et universitaire favorable (Silicon Valley, Sophia Antipolis, banlieue sud de Paris, Grenoble etc.) (20 %) ;

– la production des biens se localise n’importe où dans le monde en fonction des contraintes juridiques, financières, fiscales, douanières etc. et du coût du transport (10 %) ;

– un réseau de services relie des centres d’exploitation (serveurs, centres d’appel, traitement du courrier et des messages, intermédiation commerciale, supervision) dont certains sont proches du bassin de compétence et d’autres disséminés selon les contraintes linguistiques (20 %) ;

– les services de proximité (conseil, assistance, installation, maintenance sur site), qui nécessitent de nombreux emplois au contact de la clientèle, sont répartis sur le territoire géographique selon une densité proportionnelle à celle des clients (40 %).

 

L’entreprise demande aux concepteurs d’être inventifs, aux agents opérationnels de faire preuve d’initiative et de sens des responsabilités. Il en résulte d’importants changements par rapport à la gestion des ressources humaines de l’ère industrielle. Celle-ci visait à faire intervenir dans des conditions sociales aussi paisibles que possible une main d’œuvre disciplinée qui exécutait le travail répétitif nécessaire pour piloter et assister les machines.

Dans l’entreprise contemporaine, l’agent opérationnel intervient sur le terrain dans un processus de production qui doit être rapide et, autant que possible, sans défauts. L’entreprise lui attribue donc un pouvoir de décision, quitte à débriefer a posteriori en cas d’incident.

Par ailleurs les concepteurs et les experts de la direction générale sont des spécialistes, ainsi que les agents qui travaillent dans les services supports (à la DSI, la direction des ressources humaines etc.). Or un spécialiste ne peut faire bénéficier l’organisation de sa compétence que si l’entreprise sait l’écouter ; de même, elle doit savoir écouter les informations que les agents opérationnels rapportent du terrain sur lequel ils interviennent.

En outre, l’entreprise ne peut être efficace que si les diverses spécialités qu’elle articule savent coopérer : il faut donc que les spécialistes soient capables d’écouter ce que leurs disent des personnes appartenant à d’autres spécialités.

Enfin, la diversification des produits en variété suppose une segmentation de la clientèle, fondée sur une connaissance approfondie des besoins des clients ; la relation de service suppose que l’on sache les écouter.

« Écouter quelqu’un en s’efforçant sincèrement de comprendre ce qu’il veut dire », c’est la meilleure définition du respect. Dans l’entreprise contemporaine, le respect envers les salariés, le respect des salariés entre eux, le respect envers les clients sont devenus des conditions nécessaires de l’efficacité. La discipline « à la prussienne » qui, pensait-on, s’imposait dans l’entreprise industrielle de naguère n’est plus de mise.

Cette économie du respect ne peut se maintenir que si le respect est réciproque : cela nécessite un commerce de la considération, une écoute mutuelle qui s’amorce et se prolonge dans la durée.

Ainsi les contraintes de l’efficacité incitent, de façon certes fortuite, à obéir à l’injonction morale qui concerne la qualité des rapports humains. Cette coïncidence rencontre bien sûr l’opposition des prétendus « réalistes » qui, confondant la violence et l’énergie, estiment que seule la brutalité puisse être efficace : comme l’informatisation, le commerce de la considération rencontre des obstacles et suscite des blocages.

Le fait est cependant que la capacité à écouter, à motiver et animer une équipe d’experts, que l’écoute attentive des clients sont de plus en plus souvent jugées nécessaires[23]. L’expérience du logiciel libre, dont personne ne peut nier la réussite économique, a confirmé la nécessité du commerce de la considération pour la réussite des projets et permis de dégager la silhouette apparemment paradoxale du « dictateur bienveillant », arbitre coopté ou accepté d’une équipe ou de l’entreprise tout entière[24].

Violence et prédation

L’entreprise, exposée au risque maximum, s’entoure de partenaires pour le répartir. Mais elle sera aussi soumise à des tentations. Quand on n’est pas sûr de la pérennité de son marché, quand on se sent menacé par les initiatives des concurrents, il est tentant d’« acheter les acheteurs » – c’est à dire en bon français de corrompre les personnes qui, dans les entreprises clientes, sont chargées de comparer les offres des fournisseurs, de dépouiller leurs propositions etc. Il faudra pour cela constituer une caisse noire, elle-même alimentée par des rétrocommissions (part de commission qu’un corrompu rétrocède à l’entreprise), par des versements en liquide effectués par des personnes que l’entreprise aura obligées ou par divers procédés comptables illicites (fausses factures etc.).

L’économie du risque maximum suscite par ailleurs une ambiance particulière : les entrepreneurs sont des joueurs qui doivent anticiper non seulement les événements qui se produiront pendant la partie, mais les évolutions de la règle du jeu elle-même[25]. Assumant des risques qui, les faisant chuter, peuvent leur faire perdre le capital de réputation qui est leur principal patrimoine, ils jugent légitime de s’attribuer des rémunérations parfois extravagantes et confortées par des stock options. Ces dernières, les rendant solidaires des actionnaires, les poussent à accroître au maximum la part du profit dans la valeur ajoutée au détriment des salaires.

Par ailleurs l’équilibre qui s’instaure sur le marché des produits obéit au régime de la concurrence monopoliste[26] : chaque entreprise est en position de monopole envers les consommateurs qui préfèrent les variétés qu’elle produit, en concurrence par les prix envers ceux qui sont indifférents entre ses variétés et celles offertes par d’autres. On retrouve ainsi, dans l’économie contemporaine qui est aussi la plus efficace, la plus performante que l’humanité ait jamais connue, une structure qui rappelle la topographie de l’ère féodale : l’entreprise contrôle un territoire qu’elle domine (une segmentation tarifaire lui permet d’extraire de chaque consommateur, comme le font les compagnies aériennes, le prix maximum que celui-ci est disposé à payer) et cherche à évincer ses voisins contre lesquels elle mène une guerre de razzias et de conquête[27].  

L’économie industrielle a certes été violente : la concurrence était rude entre les entreprises et entre les nations, ses implications sociales et culturelles avaient suscité le désarroi et on peut sans doute compter parmi les catastrophes conséquentes les guerres auxquelles l’industrie avait d’ailleurs fourni des armes d’une puissance inédite. Mais quelle que fût sa violence l’économie industrielle s’était construite sur le principe de l’échange équilibré : nul n’est contraint, sur le marché, de vendre ou d’acheter à un prix qui ne lui convient pas.

On trouvait ainsi, à la base de cette économie sinon dans tous ses développements, un principe paisible. Le fait est que sous le règne de l’économie industrielle la population humaine a été multipliée par six et l’espérance de vie par plus de trois : l’humanité[28] comptait un milliard d’individus en 1800, six milliards en 1999 ; L’espérance de vie à la naissance[29] était de 25 ans en 1800, elle est aujourd’hui de 68 ans dans le monde et de 80 ans en France. Certes le nombre ne fait pas la qualité, mais sous l’aspect quantitatif au moins l’industrialisation n’a pas nui à l’espèce humaine.

A la base de l’économie contemporaine, on trouve par contre une violence endémique. De nombreux témoins constatent depuis 1975 une montée de la criminalité en col blanc[30], de la prédation des patrimoines mal protégés (notamment les ressources naturelles des pays pauvres[31]), le tout tirant parti des outils que fournit l’APU pour noircir et blanchir les fonds, pour corrompre discrètement avec la complicité d’Etats devenus des « paradis bancaires[32] ». La corruption, touchant l’entreprise et les grands systèmes institutionnels eux-mêmes (parlementaires, magistrats, douaniers, policiers, journalistes), sape l’apport d’efficacité de l’entreprise contemporaine.

*     *

L’histoire enseigne que l’humanité a tenté de se suicider chaque fois qu’un nouveau système technique lui offrait des possibilités qui, étant nouvelles, l’obligeaient à bousculer ses institutions et à modifier son organisation sociale, ses échelles de valeurs et ses critères de légitimité. « Plutôt mourir que changer », telle semble être la devise de notre espèce. Après la Renaissance sont venues ainsi les guerres de religion ; après l’industrialisation sont venus les totalitarismes et les guerres mondiales.

L’optimisme serait donc coupable car les risques sont élevés. Mais le pessimisme n’est pas de mise non plus : il ne convient pas d’assimiler comme l’a fait Paul Virilio la « bombe informatique » à la bombe atomique[33], ni de la diaboliser après l’avoir réduite à cette numérisation qui provoque chez le littéraire un frisson d’horreur. L’informatique n’est pas, répétons-le, bonne ou mauvaise par elle-même ; tout comme le marteau qui peut aussi bien servir à planter un clou qu’à assassiner, elle fera ce qu’on lui demande.  

Comme elle est puissante, comme elle transforme le monde dans lequel nous vivons – car, au-delà de l’entreprise sur laquelle nous nous sommes focalisés ici, elle pénètre avec l’Internet et le téléphone mobile notre vie quotidienne ainsi que celle de nos enfants – il importe de la comprendre pour pouvoir la maîtriser et la mettre au service des valeurs que nous entendons promouvoir.

Cela demande travail et minutie, temps et patience : l’apprentissage d’un langage de programmation demande autant d’effort que celui d’une langue étrangère et il faut puiser dans l’arsenal de la philosophie si l’on veut comprendre les SI. Mais que les clercs prennent garde, quelle que soit leur fierté professionnelle, à ne pas se comporter comme ces théologiens qui ont refusé de regarder dans la lunette astronomique que leur tendait Galilée : cela ne pouvait rien leur apprendre, pensaient-ils, puisque tout est déjà dans Aristote et saint Thomas[34].


[1] « Techniques de l’Information et de la Communication » (on dit souvent, de façon emphatique mais impropre, « technologies » au lieu de « techniques »). Anglais : « Information Technology » (IT).

[2] Nicolas Baverez, Les trente piteuses, Flammarion 1999.

[3] Bertrand Gille, Histoire des Techniques, Gallimard 1978.

[4] Les causes de cette révolution furent certes multiples, il n’en reste pas moins que les institutions et la société de l’ancien régime bloquaient l’industrialisation. 

[5] C’est alors que les constructeurs automobiles envisagèrent, pour la première fois, d’informatiser les voitures pour économiser de l’essence (David Allan Grier, « Controlling the Conversation », Computer, septembre 2007).

[6] « Bâtiment et travaux publics ».

[7] D’après Eurostat, ce taux était en 2003 de 75,4 % en Grande-Bretagne et de 74,9 % en Suède alors qu’il était de 70,3 % en France – qui, à cet égard, se trouve donc dans la moyenne des pays européens.

[8] Lire par exemple pour les aspects techniques et économiques : Bertrand Gille, op. cit., et Jean-Luc Gréau, L’avenir du Capitalisme, Gallimard 2005 ; pour les aspects militaires, Rupert Smith, The Utility of Force, Allen Lane 2005.

[9] Max Weber, Die protestantische Ethik und der Geist des Kapitalismus, 1904.

[10] Antonio Gramsci, « Americanismo e Fordismo » in Note sul Machiavelli, Istituto Gramsci 1975, p. 476.

[12] En anglais UPA, Ubiquitous Progammable Automaton.

[13] Au sens de logos, parole, et non de logique, raisonnement.

[14] Harold Abelson et Gerald Jay Sussman, Structure and Interpretation of Computer Programs, MIT Press 1996.

[15] Donald Knuth, The Art of Computer Programming, Addison Wesley 1999.

[16] C. A. R. Hoare, Communicating Sequential Processes, Prentice-Hall 1985.

[17] « Direction des Systèmes d’Information » : c’est le nom que l’on donne, dans beaucoup d’entreprise, à la direction responsable de l’informatique et des télécoms.

[18] « Société de service en ingénierie informatique ». Exemples : Cap Gemini, Atos, EDS etc.

[19] Un workflow informatise un processus par la programmation des tables d’adressage, horloges, indicateurs etc. ainsi que par la spécification des objets que les agents opérationnels devront manipuler.

[20] « L’administration des données est un travail intellectuel, donc superflu » (DG d’une grande entreprise, 1996).

[21] Hiérarchie (hieros archein, « pouvoir sacré ») est un terme du droit canon. Il désigne le pouvoir de l’évêque dans son diocèse.

[22] Service : « mise à disposition temporaire d’un bien ou d’une compétence » (Magali Demotes-Mainard, « La connaissance statistique de l’immatériel », Contribution de l’INSEE au Groupe de Voorburg sur la statistique des services, Tokyo 6-10 octobre 2003.

[23] Nelson D. Schwarz, « C. E. O. Evolution Phase 3 », The New York Times, 10 novembre 2007.

[24] Karl Fogel, Producing Open Source Software, O’Reilly 2005.

[25] W. Brian Arthur, « Increasing Returns and the New World of Business », Harvard Business Review juillet‑août 1996.

[26] Edward Chamberlin, Theory of Monopolistic Competition, 1933, et Joan Robinson, The Economics of Imperfect Competition, 1933.

[27] Michel Volle, Prédation et prédateurs, Economica 2007, à paraître.
 

[28] Gilles Pison et Nadine Belloc, « La population mondiale...et moi? », Population & Sociétés mai 2005.
 

[29] Gilles Pison, « France, 2004 : l’espérance de vie franchit le seuil de 80 ans », Population & Sociétés, mars 2005.

[30] Jean-Louis Gergorin, Rapacités, Fayard 2007.

[31] François-Xavier Verschave, Noir Silence, Les Arènes 2000.

[32] Denis Robert, La boîte noire, Les Arènes 2002.

[33] Paul Virilio, La bombe informatique, Galilée 1998
 

[34] « The theologians who declined, when invited, to look through Galileo’s telescope, were certainly scholastics and therefore already, as they thought, in possession of sufficient knowledge about the material universe. If Galileo’s findings agreed with Aristotle and St Thomas there was no point in looking through a telescope; if they did not they must be wrong » (Joseph Needham, Science and Civilisation in China, Cambridge University Press 1962, vol. 2 p. 90).