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Simone Bertière, Mazarin, de Fallois 2007

2 novembre 2007

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Pour lire un peu plus :

-
La Fronde
- À propos de la politique gouvernementale
-
Matignon gère
-
Crise de système
- Mémoires du Cardinal de Retz
- Structure de la féodalité

- Talleyrand

L’État nous apparaît souvent comme un monstre froid, une machine insensible à l’humanité et mue par des agents dont le sérieux a pour seul ressort l’ambition de faire carrière. Le contrôle de cette machine est l’un des enjeux de la lutte pour l’accès au pouvoir.

Mais toute machine, avant d’exister et de fonctionner, a dû être conçue en réponse à une intention : la description objective, réaliste, de son fonctionnement et de ses effets ignore la mission qu’ont voulu promouvoir ses inventeurs. Elle reste incompréhensible car elle ne rend pas compte de ce que serait le monde si cette machine n’existait pas.

*     *

L’épisode de la Fronde montre les Français sans État et livrés à leurs impulsions.

Les grands seigneurs (Gaston d’Orléans, frère du Roi ; Condé, prince du sang ; Turenne, frère du duc de Bouillon), nourrissant des ambitions dynastiques, complotent contre le Roi, lèvent des troupes de mercenaires, pactisent avec les ennemis de la France (l’Autriche, l’Espagne) et prennent la tête de leurs armées. Les parlementaires, magistrats dont la charge est devenue héréditaire, ambitionnent de gouverner mais s’empêtrent dans le formalisme juridique. Tous ces intrigants manipulent le peuple dont la violence, une fois débridée, échappe à leur contrôle. Les campagnes sont dévastées par les armées qui les traversent, ruinées par les impôts qu’il faut lever pour faire la guerre.

Mazarin s’appuie tantôt sur l’un, tantôt sur l’autre, pour asseoir la puissance de l’État – c’est-à-dire du Roi – et pacifier la société. Sans lui, le travail amorcé par Richelieu n’aurait pas été accompli. Quand il meurt en 1661 les pays ennemis ont été vaincus, mais comme ils les a laissé sauver la face ils ne nourriront pas un désir de revanche. Les grands seigneurs, domptés, sont réduits à mendier auprès du Roi faveurs et subsides. L’Église est cantonnée au spirituel – domaine il est vrai immense. Le Parlement est muselé.

Mazarin a été méprisé, ridiculisé, détesté par les Français. Il parlait avec l’accent italien ; dans cette société violente, il était poli et patient ; il préférait le compromis au conflit. Tout cela heurtait les valeurs d’une nation dont les mœurs étaient encore celles de la féodalité.

Mazarin s’est énormément enrichi mais sa fortune est, comme le sera au XIXe siècle celle de Talleyrand, une des armes de sa politique : il achète l’ennemi plutôt que de le combattre. À sa mort il la lègue au Roi : ainsi elle retournera à l’État.

Simone Bertière fait ressortir ce qui a continûment orienté l’action de Mazarin – la fidélité au Roi, l’édification de l’État, la pacification de la société – et l’extrême diversité des situations dans lesquelles il s’est trouvé. Le mécanisme de chaque intrigue est démonté, les enjeux des protagonistes sont élucidés. La simplicité, la clarté de la langue contrastent avec la complexité des objets qu’elle évoque : c’est un vrai tour de force.